Jérôme Clément-Wilz : « Ceci est mon corps », un récit bouleversant

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L'église Saint-Paterne d'Orléans (Loiret, Centre-Val de Loire, France) - Photo : Peter Potrowl / Wikimédia

Le 6 octobre prochain, Arte diffusera Ceci est mon corps, un documentaire puissant dans lequel le réalisateur Jérôme Clément-Wilz racontera les violences sexuelles subies dans son enfance et son long combat judiciaire contre le prêtre pédocriminel qui l’a détruit. Entre enquête intime, confrontation et quête de justice, un témoignage à la fois cru et nécessaire.

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« Ceci est mon corps » de  Jérôme Clément-Wilz : Un témoignage courageux

Le 6 octobre, Arte diffusera à 22 h 50 le documentaire Ceci est mon corps, réalisé par Jérôme Clément-Wilz. Ce film s’inscrit dans une démarche singulière : raconter à la première personne l’histoire d’un enfant brisé par les violences sexuelles commises par un prêtre, puis la lente reconstruction d’un adulte devenu cinéaste. Pendant six années, caméra en main, il consignera les étapes d’une procédure judiciaire éprouvante, tout en explorant les silences de sa famille et les blessures d’une mémoire lacérée.

Né d’un besoin vital de témoigner, Ceci est mon corps s’impose comme une œuvre où l’expérience intime prend une dimension collective. En dénonçant les abus d’un homme qui a profité de son autorité religieuse et de sa proximité avec les familles, le réalisateur met en lumière les mécanismes de la culpabilité, du déni et du silence qui nourrissent la pédocriminalité dans l’Église

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Invité le 2 octobre sur France Inter par Sonia Devillers, Jérôme Clément-Wilz n’a pas pu retenir ses larmes en évoquant son histoire. De ses 10 à ses 14 ans, il a été victime d’Olivier de Scitivaux, prêtre d’Orléans, proche de sa famille et omniprésent dans les activités paroissiales. Le cinéaste a décrit avec une précision glaçante les gestes de son agresseur, marqués dans sa mémoire par l’image obsédante de ses mains. C’est ce souvenir, comme une empreinte indélébile, qu’il affrontera lors de sa confrontation judiciaire avec le prêtre, dans le cadre de l’enquête.

Le film raconte cette procédure entamée en 2017, longue et douloureuse. Le spectateur suivra les allers-retours du réalisateur chez ses avocats, la lente compréhension de son statut de plaignant, la difficulté à se reconnaître victime après des années de silence. En parallèle, Jérôme Clément-Wilz mène une enquête intérieure dans la maison familiale, fouillant le grenier, dialoguant avec ses parents, cherchant à mettre des mots sur des souvenirs fragmentés et sur l’incompréhension des siens.

En 2024, la justice a tranché : Olivier de Scitivaux a été condamné à 17 ans de prison, dont dix ans de sûreté, pour viols et agressions sexuelles sur quatre mineurs entre 1990 et 2002. Pour le réalisateur, ce verdict marque une étape décisive : « marcher sur un sol plus ferme, ensemble », a-t-il confié, évoquant la possibilité d’une reconstruction partagée avec ses parents.

Une œuvre intime à portée collective

Plus qu’un récit judiciaire, Ceci est mon corps interroge la mémoire traumatique, le poids du silence et la manière dont un enfant abusé peut devenir adulte tout en restant prisonnier de son passé. Jérôme Clément-Wilz transforme son histoire en geste cinématographique, où la caméra devient outil de survie autant que de vérité.

Son documentaire n’édulcore rien : les mots seront crus, le récit brut, mais c’est précisément ce qui lui donne sa force. En filmant son propre combat, il ouvre un espace collectif de réflexion sur la pédocriminalité dans l’Église et sur le long chemin de reconnaissance des victimes.

Arte propose ainsi un film nécessaire, d’une intensité rare, qui rappelle combien témoigner reste une forme de résistance. En osant dire « Ceci est mon corps », Jérôme Clément-Wilz rend visible ce qui fut trop longtemps enfoui : la violence, la honte, mais aussi la possibilité de reprendre possession de soi.

Affaire Olivier de Scitivaux
Photo de couverture © Peter Potrowl / Wikimédia

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Souffle inédit est inscrit à la Bibliothèque nationale de France sous le numéro ISSN 2739-879X.
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