Festival du film franco-arabe de Noisy-le-Sec : une 14ᵉ édition entre résistance et ouverture

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La 14ᵉ édition du Festival du film franco-arabe de Noisy-le-Sec se tiendra du 7 au 16 novembre 2025 au cinéma Le Trianon et hors-les-murs, célébrant la Tunisie et le dialogue des cultures à travers plus de 60 films venus de 23 pays.

Festival du film franco-arabe de la ville de Noisy-le-Sec, 14ᵉ édition, 7 au 16 novembre 2025, au cinéma Le Trianon et hors-les-murs

Par Djalila Dechache

D’année en année, depuis 2012, le festival prend de l’ampleur, s’ouvre à d’autres lieux et acquiert un public fidèle. Il démontre la vitalité d’une activité artistique d’une part, et d’autre part celle d’un monde en plein bouleversement, que l’on soit arabe ou pas.

Festival du film franco-arabe de Noisy-le-Sec

Il existe désormais dans une vision pluridisciplinaire, avec la musique, les arts plastiques et la littérature, dans des lieux de la ville et au-delà. C’est la preuve de son succès. Pour reprendre les mots du maire de Noisy-le-Sec, monsieur Olivier Sarrebeyrouse, ce festival est né d’une conviction et d’une vocation : être un espace où la culture se fait résistance, mémoire et invention.

En effet, c’est un pari important que de programmer un festival de cinéma tel que celui-ci en Seine-Saint-Denis, déjà bien doté en événements artistiques et culturels, il est vrai, mais celui-ci est ciblé vers la production cinématographique franco-arabe. Cela en dit long sur le terme « franco-arabe » : il parle d’amitié, de fraternité, de deux pôles opposés géographiquement au demeurant, qui se trouvent et se retrouvent à l’aune d’une idée, d’une vision du monde, d’une évidence. Et cela fonctionne, et cela a du sens, et cela répond à une attente, dans un département jeune, métissé, assoiffé de culture qui leur parle, qui les concerne.

Madame Wiam Berhouma, maire-adjointe à la culture de la ville de Noisy-le-Sec, insiste sur l’aspect exceptionnel de cet événement qui propose au public des films rares, inédits ou récents. Elle a tout à fait raison de le souligner. Ainsi, ce festival est à la fois populaire, de qualité, ancré dans la vie culturelle noiséenne et, j’ajouterais, séquano-dionysienne.

Chaque année, un pays est mis à l’honneur. En 2025, c’est la Tunisie qui offre un panorama d’écritures de scénarios et leur réalisation, près des soubresauts de l’actualité, comme ce film projeté pour la presse, en avant-première — il sera en salles le 26 janvier 2026.
Il s’agit de :
« Promis le ciel » (Sama bila ard en arabe, Ciel sans terre) de la réalisatrice et productrice tunisienne Erige Sehiri, traitant des réfugiés d’Afrique subsaharienne, ici de Côte-d’Ivoire. Ils remontent vers le nord, s’installent quelque temps en Tunisie, à Tunis ou au Maghreb, avec moult difficultés. Ils deviennent apatrides, sans papiers. Ils ne sont pas les bienvenus, ils sont ostracisés parce qu’ils sont réfugiés et parce qu’ils sont noirs, non productifs. Ils demandent l’asile, vivotent par une économie circulaire du système D, entre eux.

Ils pratiquent leur religion dans une sorte de hangar. Ils sont évangélistes. Leur pasteure, Marie, rôle tenu par la comédienne Aïssa Maïga, leur prodigue le message du Christ. Les comédiennes africaines sont remarquables, y compris la petite Kenza, rescapée d’un naufrage. Pour la première fois, me semble-t-il, on voit dans un long-métrage le quotidien des réfugiés, très dur, humiliant, dans le rejet à chaque situation. Comment peut-il être plus enviable que le leur au pays ? C’est un film coup de poing qui montre l’envers du décor des réfugiés une fois arrivés sur la terre ferme.

Près de 60 films venant de 23 pays seront montrés en présence des cinéastes — courts et longs, fictions et documentaires — dont 13 inédits, 8 avant-premières, des films du patrimoine et des projections jeunesse en provenance du Soudan, et c’est une nouveauté. On ne peut que féliciter ce choix. La France, l’Égypte, l’Algérie, le Mali, la Mauritanie, la Palestine, le Maroc, l’Irak et la Syrie seront également représentés. C’est le fruit des choix judicieux de la directrice artistique du festival, Mathilde Rouxel, qui a concocté toutes ces richesses à découvrir, pour la première fois pour certains d’entre eux. Un immense plaisir et de belles découvertes nous attendent à chaque projection.

Des films de fiction, des documentaires, des courts-métrages, des tables rondes, la présence de réalisatrices et réalisateurs à l’issue de leur projection viendront échanger avec le public de vive voix.

Le parrain d’honneur est le cinéaste humaniste Costa-Gavras, récompensé pour l’ensemble de son œuvre cinématographique. Il apporte son regard de citoyen, sa caution. Il est le témoin engagé de son temps. C’est un gage énorme de soutien, d’encouragement et d’honneur.

La réalisatrice tunisienne Hind Meddeb est la marraine de cette édition. Franco-arabe, elle l’est aussi : avec une mère algéro-marocaine et un père tunisien, elle se situe sur trois cultures. Elle aime à dire : « J’ai quatre pays et j’en suis fière, je les prends tous. » Bel exemple de métissage, de pluri-culture, une richesse accomplie dans son travail de réalisation cinématographique, dont quelques-uns de ses films sont programmés.

Le cinéma et son café, Le Trianon, dirigé par Julien Tardif, avec ses lettres lumineuses rouges dès que la nuit tombe, devient un pôle d’art et de culture de toute importance. Avec l’arrivée, à ses pieds, de la ligne 11 du métro flambant neuf, la physionomie de la ville s’en voit transformée, ses habitants aussi. Sa réputation dépasse les limites de son territoire. La culture défendue et développée par ses élus poursuit l’affirmation d’une nouvelle ère pour le bien-être et le développement de tous et de toutes.

Un remerciement particulier à Géraldine Gance, l’attachée de presse de ce festival : c’est elle qui offre le premier contact avec cette magnifique manifestation. C’est elle aussi qui sait si bien transmettre son enthousiasme.

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Souffle inédit est inscrit à la Bibliothèque nationale de France sous le numéro ISSN 2739-879X.
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