Présenté au Festival international du film de Marrakech, Essit (La Dame) de Marwan Hamed propose une lecture humaine et contemporaine d’Oum Kalthoum. Au centre du film, Mona Zaki livre une interprétation longuement préparée, qui marque une nouvelle étape dans une carrière façonnée par les rôles complexes et l’attention au détail.
Mona Zaki dans Essit (La Dame) : Un film qui revisite l’héritage d’une voix éternelle
Par la rédaction
Un film ancré dans l’héritage d’Oum Kalthoum
Projeté en avant-première à Marrakech, Essit (La Dame) a suscité un long applaudissement, signe de l’intérêt du public pour cette nouvelle approche de la vie d’Oum Kalthoum. Réalisé par Marwan Hamed et écrit par Ahmed Murad, le film s’éloigne du récit biographique classique pour interroger la dimension humaine d’une artiste dont la présence demeure intacte dans la culture arabe, cinquante ans après sa disparition.
Hamed explique avoir été saisi par « la capacité d’Oum Kalthoum à dépasser les obstacles grâce à une volonté rare ». Le film explore cette force intérieure, tout en restant attentif aux choix difficiles, aux doutes et aux renoncements qui ont façonné son destin.
Le scénariste Ahmed Murad précise qu’Essit ne cherche pas à concurrencer les œuvres précédentes, mais à proposer un regard adapté aux interrogations du public d’aujourd’hui. Le film réinterprète certains airs liés à la chanteuse, avec une approche musicale pensée pour une nouvelle génération.
Une distribution remarquable et une direction artistique soignée
Autour de Mona Zaki, le film réunit un ensemble d’acteurs confirmés : Karim Abdel Aziz, Nelly Karim, Amina Khalil, Mohamed Farrag, Ahmed Khaled Saleh, Tamer Nabil et Sayed Ragab. Le casting inclut également Ahmed Helmy en tant que guest star, une présence notable qui marque une rare réunion à l’écran avec Mona Zaki, plus de vingt ans après leur dernière collaboration au cinéma.
La production s’appuie sur une équipe technique de premier plan :
• Direction de la photographie : Abdel Salam Moussa
• Montage : Ahmed Hafez
• Musique : Hesham Nazih
• Design sonore : Wayne Pashley (nommé aux Oscars)
• Maquillage effets spéciaux : Jason Baird (nommé aux Oscars)
• Costumes : Yasmin Al Qadi
• Joaillerie : Azza Fahmy
• Décors : Mohamed Attia
Cette précision artisanale accompagne la volonté du film d’incarner plusieurs époques de la carrière d’Oum Kalthoum avec rigueur, sans céder à la reconstitution ostentatoire.
Mona Zaki : entre renouvellement et maîtrise
Avec Essit, Mona Zaki aborde l’un des rôles les plus exigeants de son parcours. L’actrice a confié que ce personnage l’a profondément marquée, au point de « ne pas réussir à s’en détacher » même après la fin du tournage.

Elle décrit Oum Kalthoum comme « une force rare », affirmant que son impressionnante longévité artistique résulte d’une combinaison de talent, de discipline et de persévérance. Pour interpréter cette figure, Zaki a suivi plus d’une année de formation intensive :
• travail vocal pour modifier ses registres,
• exercices de diction,
• préparation gestuelle,
• exploration des états émotionnels associés à chaque période de la vie de la chanteuse.
Elle explique avoir vécu des phases de doute au cours de l’apprentissage, avant de percevoir, au moment du tournage, « la somme des petites avancées invisibles ».
Au festival de Marrakech, elle reconnaît que l’envergure du rôle l’avait d’abord effrayée, et que la confiance du réalisateur ainsi que l’écriture d’Ahmed Murad ont été décisives dans son acceptation du projet.
Une carrière construite sur l’exigence
Au cinéma, Mona Zaki s’impose très tôt comme l’une des voix majeures d’une nouvelle génération d’acteurs égyptiens. Parmi ses rôles les plus marquants figure Ehky Ya Scheherazade (Dis-moi, Scheherazade, 2009), un drame social où elle incarne une présentatrice de télévision confrontée aux failles de son époque. Elle poursuit avec Asmaa (2011), considéré comme l’une de ses performances les plus saluées, dans lequel elle interprète une femme luttant contre la stigmatisation et le silence. Elle apparaît également dans des succès populaires tels que Afrah al-Qobba (Les Noces du Dôme, 2016), Cairo 678 (Le Caire 678, 2010) ou encore The Blue Elephant 2 (2019), où son jeu accompagne la montée en puissance d’un cinéma égyptien plus audacieux.
À la télévision, Mona Zaki confirme son influence à travers des séries suivies dans tout le monde arabe. Parmi les plus notables : Nisf Rabi‘ al-Akhir (La Fin du Printemps, 1996), Le‘bet Newton (Le Jeu de Newton, 2021), saluée pour sa tension dramatique, et Taht al-Wasaya (Sous Tutelle, 2023), où elle explore avec sobriété les injustices sociales touchant les femmes.
Elle alterne films d’auteur, productions populaires et rôles dramatiques, montrant une capacité à se renouveler sans renier les ancrages sociaux et politiques de ses choix artistiques. Essit s’inscrit dans cette continuité : un rôle qui interroge autant qu’il raconte.
Un récit contemporain plutôt qu’un monument figé
Si le film évoque les grandes étapes de la carrière d’Oum Kalthoum, il prend soin d’éviter l’hagiographie. Murad rappelle que représenter une figure aussi respectée implique d’aborder aussi ses fragilités et ses contradictions. Le film propose ainsi une mise en perspective : comment une génération qui n’a pas connu l’époque de la chanteuse continue-t-elle de se projeter dans sa voix ?
Cette volonté de relier passé et présent constitue l’un des axes majeurs d’Essit, qui s’adresse autant aux admirateurs de longue date qu’au public jeune, curieux de comprendre un héritage qui continue d’imprégner la scène culturelle.
Essit (La Dame) s’affirme comme une proposition cinématographique ambitieuse, qui revisite un mythe sans le figer. Mona Zaki y confirme son goût pour les rôles délicats et son souci d’aller au-delà du simple mimétisme. À Marrakech, le film a trouvé un premier écho enthousiaste — un signe prometteur pour une œuvre qui cherche à relier un monument de la musique arabe au regard d’aujourd’hui.
Le film Essit (La Dame) est annoncé pour une sortie en salles en Égypte le 10 décembre 2025.
Sources et références
– Déclarations de Marwan Hamed et Ahmed Murad à la presse
– Conférence de presse du Festival international du film de Marrakech
– Informations de production et de distribution publiées par l’équipe du film



