À Paris, la galerie Templon consacre pour la première fois une exposition à Martial Raysse, réunissant près de trente œuvres réalisées au cours de la dernière décennie. Présentées du 10 janvier au 14 mars 2026, ces peintures récentes, souvent monumentales, témoignent d’un dialogue renouvelé avec l’histoire de l’art et d’une lecture lucide du monde contemporain.
À la galerie Templon, Martial Raysse déploie une décennie de peinture
Galerie Templon, Paris
10 janvier – 14 mars 2026
À l’aube de son soixantième anniversaire, la galerie Templon ouvre l’année 2026 avec une exposition attendue : la première qu’elle consacre à Martial Raysse. Présentée du 10 janvier au 14 mars au 28 rue du Grenier-Saint-Lazare, cette exposition réunit près de trente œuvres récentes et donne à voir l’aboutissement d’une décennie de recherche picturale. Monumentales pour certaines, d’une densité symbolique constante, ces toiles affirment la vitalité intacte d’un artiste qui n’a jamais cessé de se réinventer.
Il s’agit là de la seconde grande exposition parisienne de Martial Raysse en dix ans, depuis la rétrospective majeure que lui avait dédiée le Centre Pompidou en 2014. À la galerie Templon, l’artiste déploie une peinture ample, construite, traversée par une tension dramatique qui renoue avec l’ambition de la peinture d’histoire. Trois vastes formats dialoguent avec une série de figures féminines allégoriques, composant un ensemble où le récit, la mémoire et l’actualité se superposent.
Parmi les œuvres présentées, Le Grand Jury (2022), La Peur (2023) et La Paix (2023) occupent une place centrale. Longue de quatre mètres, La Peur est travaillée par des réminiscences de la guerre en Ukraine, mêlées à des souvenirs d’enfance de l’artiste. En contrepoint, La Paix, vaste fresque de cinq mètres dévoilée lors d’Art Basel Paris à l’automne dernier, déploie une vision plus féerique, sans jamais céder à l’illusion d’une harmonie simple. Chez Raysse, la lumière n’efface pas la violence du monde ; elle en révèle au contraire les lignes de fracture.
Ces œuvres s’inscrivent dans un dialogue assumé avec les maîtres anciens. Durant ces années de recherche, Martial Raysse a nourri sa peinture d’une fréquentation soutenue de l’histoire de l’art. La Peur et La Paix résonnent ainsi avec les panneaux conçus par Picasso pour la chapelle du château de Vallauris, tout en rendant hommage à Jean Fouquet ou à Nicolas Poussin. Cette conversation avec les figures tutélaires n’a rien de citationnel : elle s’opère par la composition, la dramaturgie, l’organisation des corps et des regards.
Les visages qui peuplent aujourd’hui l’espace de la galerie sont à la fois rayonnants et amers. Leur expressivité repose sur un sens aigu de la composition et une attention constante portée à la symbolique des gestes. Un chat noir, une main fleurie, un poignard dissimulé dans l’ombre : chaque détail agit comme un seuil narratif. Le regard du spectateur est invité à circuler, à passer d’un récit à l’autre, à lire l’image par strates successives. L’œuvre se construit ainsi comme un palimpseste, où se mêlent tensions politiques, mémoire intime et mythologies collectives.
Conçues à distance des modes comme des injonctions contemporaines, ces peintures affirment une liberté rare. Les « apocalypses lumineuses » de Martial Raysse disent autant la farce que le chaos d’une humanité en mouvement. Elles témoignent d’un artiste qui observe le monde avec lucidité, sans renoncer à la puissance narrative et sensible de la peinture.
Né à Golfe-Juan en 1936, Martial Raysse occupe une place majeure dans l’histoire de l’art contemporain. Précurseur du Pop Art français, membre du Nouveau Réalisme au début des années 1960, il a très tôt interrogé la banalité des images issues de la société de consommation pour en révéler la vitalité sous-jacente. Peinture, néon, assemblage, vidéo : sa pratique s’est constamment déplacée, refusant les catégories figées.
Après Mai 68, Raysse se détourne de l’esthétisme formel et opère, dans les années 1970, un retour exigeant vers la grande peinture. Ce choix, loin d’un revirement, marque une prise de distance courageuse avec l’art officiel de son temps. Installé aujourd’hui en Dordogne, l’artiste poursuit une œuvre libre, affranchie des dogmes, attentive aux métamorphoses du monde.
Exposé dès 1960 au MoMA de New York, présent au Stedelijk Museum d’Amsterdam dès 1965, représentant la France à la Biennale de Venise en 1966, Martial Raysse a bénéficié de nombreuses expositions majeures, du Centre Pompidou au Palazzo Grassi, et a été distingué par le Praemium Imperiale en 2014. L’exposition « Œuvres récentes » à la galerie Templon s’inscrit dans cette trajectoire internationale tout en mettant en lumière un présent de la création, tendu, réfléchi, profondément contemporain.
Informations pratiques
Martial Raysse « Œuvres récentes »
10 janvier – 14 mars 2026
Vernissage le samedi 10 janvier, de 12h à 20h
Galerie Templon
28 rue du Grenier-Saint-Lazare
75003 Paris
