Le grand André Brassard est décédé

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@ Souffle inédit

Figure emblématique du théâtre québécois, André Brassard est décédé le 11 octobre 2022 à l’âge de 76 ans. Metteur en scène audacieux et complice de Michel Tremblay, il a marqué plusieurs générations par ses créations théâtrales, ses adaptations pour le cinéma et la télévision, ainsi que par son engagement pédagogique.

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André Brassard, l’inventeur du théâtre québécois moderne, s’éteint à 76 ans

André Brassard, l’un des plus grands metteurs en scène du Québec et le bâtisseur du théâtre québécois moderne, est décédé, le mardi 11 octobre 2022,  à l’âge de 76 ans des suites d’une longue maladie.

Passion pour le théâtre

Né le à Montréal le 28 août 1946, Brassard se passionne pour le théâtre dès son enfance. Il commence alors à prendre des cours de diction d’Yvonne Duckett où il fait la rencontre de son futur grand complice le grand dramaturge, romancier et scénariste québécois Michel Tremblay.

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Il signe son premier spectacle dans la compagnie « les saltimbanques » en tant que metteur en scène en 1965 avec « messe noire ». Il s’agit d’un collage de contes fantastiques dans lesquels il intercale aussi quelques textes de Trembly.

Ce grand génie a signé ses premières mises en scène importantes avec « Les Troyennes » d’Euripid et « Les bonnes »  de Jean Genet à seulement 20 ans.

André Brassard, symbole de liberté

Il participe en 1968 à la fondation du  « Centre de théâtre d’aujourd’hui »  une institution théâtrale et un centre dramatique situé à Montréal. Il créé la même année « Les belles sœurs », une pièce de théâtre qui connaitra un grand succès et révolutionnera l’histoire du théâtre québécois. Il suscita une controverse pour avoir utilisé le langage populaire « le joual ». André Brassard se retrouve ainsi un symbole de liberté et devient sollicité de tous parts.

Fait anecdotique, son compagnon de route Michel Tremblay a déclaré à radio-canada que tous les deux n’ont jamais cherché à révolutionner ou choquer la scène théâtrale québécoise. Selon lui, ils n’en ont même jamais parlé. Il réalise en 1970 une adaptation de « Lysistrata » d’Aristophane. Il crée aussi plusieurs autres pièces avec Tremblay (À toi, pour toujours, ta Marie-Lou en 1971 ou Hosanna en 1973) et des œuvres de répertoires comme « Andromatique » de Racine, « La fausse suivante » de Marivaux, et le fameux vaudeville « Le Dindon » de Feydeau.

Audacieux et polyvalent

Polyvalent, André Brassard n’a pas peur de s’attaquer au 7e art en portant à l’écran trois scénarios de Trembay qui le considère comme « l’une des personnes les plus importantes de sa vie ».
Audacieux, il n’a pas hésité à adapter plusieurs pièces de son vieux complice pour la télévision (Exemple : Sainte Carmen de la Main et la version anglaise des Belles-Sœurs).

Directeur, metteur en scène et acteur  

Il a aussi enseigné, exercice que le grand curieux qu’il était a beaucoup aimé.
Brassard est décrit comme un pédagogue « remarquable » et « exigeant ».
Il devient directeur national du théâtre de Paris en 1983 sans oublier son grand amour : la mise en scène. Parmi ses mises en scènes principales durant cette période, Britannicus en 1982; La Contre-nature de Chrysippe Tanguay, écologiste, une des premières pièces de Michel Marc Bouchard, en 1983; une reprise des « Belles-Sœurs » en 1984; deux œuvres importantes de Michel Tremblay, Albertine en cinq temps en 1985 et « Le vrai monde » en 1987.

En 1986, il dirige la création de « Les Feluettes » de Michel Marc Bouchard, une pièce de théâtre qui connait un grand retentissement. Il monte « Paravents » de son idole Jean Genet. Cette œuvre a été plutôt mal reçue à Ottawa. Par contre, elle a été accueillie d’une manière enthousiaste à Montréal. Il quitte la direction du théâtre de Paris en 1989 et monte l’année suivante « Nelligan » la première création de l’Opéra de Montréal.

Il continuera à impressionner par son génie grâce à « En attendant Godot », de Beckett. Il choisira d’être acteur en plus d’être metteur en scène avec «  Encore une fois », une pièce largement autobiographique de Michel Tremblay. Il assure la direction artistique de la section française de l’École nationale de théâtre du Canada établie à Montréal de 1991 à 2000.

Souci de santé

Sa santé devient fragile en 1999 à cause d’un AVC qu’il fait et qui l’affaiblit particulièrement. Il n’hésite pourtant pas à renouer avec le 4ème art en 2001 en dirigeant des pièces de Tremblay : « État des lieux » en 2002 ou « Le Passé antérieur » en 2003. Ces deux œuvres ne seront pas à la mesure de son génie. Il commence à diriger « Bonbons assortis » de celui-ci en 2006.

Ce qui le maintenait en vie

Cependant, un conflit éclate entre les amis de toujours. La mise en scène est retirée à Brassard, fait qui met fin à une collaboration qui aura duré plus de trois décennies. Il fait quelques autres mises en scènes qui n’ont pas été particulièrement brillantes à l’exception peut être de « Oh les beaux jours » de Beckett, à l’Espace Go, en 2008, et « Une truite pour Ernestine Shuswap » du dramaturge Tomson Highway en 2009. Il a toujours dit que ce qui le maintenait en vie est le fait de travailler sur un projet aussi lointain soit-il.

Livres et documentaire

Le libanais Wajdi Mouawad a réussi le grand exploit de faire un livre d’entretien avec lui (Moi, le méchant, Leméac 2004). Guillaume Corbeil a écrit une biographie de cet artiste (Brassard, Libre expression 2010).
Claude Founier a réalisé en 2018 un documentaire de 71 minutes intitulé « Notre été avec André ».

La maladie a certes vaincu André… Mais, son œuvre est et restera toujours invincible.

L’artiste
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Souffle inédit est inscrit à la Bibliothèque nationale de France sous le numéro ISSN 2739-879X.
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