Boualem Sansal, lauréat du Cino Del Duca 2025

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Sous la Coupole de l’Institut de France, le 18 juin prochain, le romancier franco-algérien Boualem Sansal recevra le Prix mondial Cino Del Duca 2025.

Boualem Sansal, lauréat du Prix mondial Cino Del Duca 2025 : Un hommage à la liberté d’écrire

Une prestigieuse récompense pour une voix libre et humaniste de la littérature francophone

Boualem Sansal, lauréat du Cino Del Duca 2025

Attribuée par la Fondation Simone et Cino Del Duca, sur recommandation du comité dirigé par Amin Maalouf, cette distinction prestigieuse honore une œuvre littéraire dont le message incarne un humanisme contemporain. À l’âge de 75 ans, l’auteur du Village de l’Allemand ou de 2084 : la fin du monde est célébré pour la force de son engagement, son courage intellectuel, et la beauté d’une écriture dédiée à la liberté.

Un écrivain engagé, au-delà des frontières et des censures

Né en 1949 à Theniet El Had en Algérie, Boualem Sansal a d’abord été ingénieur et docteur en économie, avant de se consacrer à l’écriture à l’âge de 50 ans. Son premier roman, Le Serment des barbares (1999), constitue un acte fondateur : il y décrit sans détours la crise politique et sociale de l’Algérie postcoloniale. Depuis lors, ses œuvres reflètent une volonté constante de dénoncer les abus autoritaires, les violences idéologiques et les fanatismes.

En 2003, la sortie de Dis-moi le paradis et ses critiques explicites du régime en place, lui valent d’être évincé de son poste au ministère de l’Industrie. Sa réponse ? Une lettre ouverte censurée, Poste restante : Alger (2006), adressée à ses compatriotes. L’écrivain continue avec Le Village de l’Allemand (2008), un roman frappant qui met en parallèle la guerre civile algérienne et les crimes nazis, salué en France et à l’international, notamment par le Prix de la paix des libraires allemands en 2011.

Figure éminente de la francophonie littéraire, Boualem Sansal examine de près l’islamisme politique, comme dans son essai Gouverner au nom d’Allah (2013). Son roman 2084 : la fin du monde (2015), une dystopie puissante inspirée de l’œuvre d’Orwell, reçoit le Grand Prix du roman de l’Académie française et consacre l’auteur comme un éminent styliste et penseur de notre époque.

Une reconnaissance internationale malgré la répression

La distinction de la Fondation Del Duca résonne d’autant plus fort que Boualem Sansal traverse une période politique et personnelle difficile. En novembre 2024, à son retour de Paris, il est arrêté à l’aéroport d’Alger, accusé d’« atteinte à l’unité nationale » après des propos sur les relations algéro-marocaines. Il est incarcéré et condamné, le 25 mars 2025, à cinq ans de prison ferme. Ce contexte confère au Prix mondial une dimension politique assumée, réaffirmant la mission humaniste de la littérature.

« Ce prix rend hommage à la force d’un écrivain qui, au-delà des frontières et des censures, continue de faire entendre une parole libre », souligne le communiqué officiel. En honorant Sansal, le jury réaffirme son engagement envers la liberté de création et de pensée, valeurs au cœur de l’œuvre du lauréat.

Une distinction majeure du monde littéraire

Créé en 1969 par Simone Del Duca, le Prix mondial Cino Del Duca est l’un des prix littéraires les mieux dotés au monde (200 000 €), après le Nobel. Il récompense une carrière marquée par un message humaniste, qu’il soit scientifique ou littéraire. Abritée depuis 2005 par l’Institut de France, la Fondation Simone et Cino Del Duca œuvre chaque année pour faire rayonner les arts, les sciences et les lettres, avec une dotation annuelle de près de deux millions d’euros.

Le jury du prix, composé de 14 figures éminentes, dont 12 membres de l’Institut de France, reflète cette exigence d’excellence intellectuelle et artistique. Sa présidence par Amin Maalouf, écrivain engagé pour le dialogue des cultures, confère une résonance particulière au choix de Boualem Sansal.

Une œuvre indispensable

Avec Le train d’Erlingen, Abraham ou la Cinquième Alliance, et bien d’autres textes, Boualem Sansal a construit une œuvre dense, critique, d’une rare cohérence, où la fiction s’articule toujours à la pensée. Il se distingue par une langue française rigoureuse, qu’il considère comme un espace de liberté.

Le Prix mondial Cino Del Duca 2025 ne vient pas simplement couronner une carrière littéraire exceptionnelle. Il rappelle que l’écriture peut être un acte de résistance, une invitation à la clairvoyance, un combat pour la dignité humaine.

La fondation
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Souffle inédit est inscrit à la Bibliothèque nationale de France sous le numéro ISSN 2739-879X.
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