« La Source » : un voyage saisissant dans les tréfonds de l’âme humaine
Le premier jour de l’année 2025 a vu la sortie en salles de La Source, le nouveau long-métrage de Meryam Joobeur. Ce film, une coproduction entre la Tunisie, le Canada, la France et le Qatar, marque une étape majeure dans la carrière de la réalisatrice, qui avait déjà fait sensation avec son court-métrage Brotherhood, nommé aux Oscars 2020.
Dans un village isolé de Tunisie, Aïcha (interprétée par Salha Nasraoui) et Brahim (Mohamed Grayaa) vivent dans la douleur du départ inexpliqué de leurs deux fils aînés, partis combattre dans une guerre lointaine. Le retour soudain de Mehdi (Malek Mechergui), accompagné d’une étrange fiancée voilée et muette, bouleverse la vie familiale et communautaire. Cette réapparition, entre vision et réalité, réveille des tensions latentes et plonge le village dans une atmosphère de mystère et d’angoisse.
Aïcha, dotée de dons prophétiques, devient le pivot de cette intrigue chapitrée en trois actes. Ses visions prémonitoires et la montée en puissance d’événements étranges – une brebis morte, des disparitions inexpliquées de jeunes hommes – accentuent la tension dramatique. Le policier Bilal, proche de la famille, mène une enquête qui expose les fractures et les peurs enfouies de la communauté.
La Source « Mé el Ain » captive par son esthétique saisissante. Les nuances de bleu, de gris et les touches pourpres vibrantes créent un contraste puissant avec le paysage rural tunisien. La photographie, signée par une équipe talentueuse, sublime chaque plan, donnant au film une dimension presque onirique. Les choix sonores, tout en subtilité, renforcent cette sensation de mystère insaisissable qui habite les deux premières parties du récit.
Meryam Joobeur joue habilement avec les codes du fantastique et de l’horreur pour aborder des thèmes profonds : le poids des traditions, l’amour maternel face à l’indicible, et les conséquences des choix individuels sur une communauté tout entière. Ce mariage entre drame intime et critique sociale démontre la maturité et l’audace de la cinéaste.
Au-delà de son intrigue captivante, La Source invite à une introspection sur les déchirements familiaux, les stigmates laissés par les conflits modernes et la capacité à surmonter l’obscurité. Aïcha, en tant que mère protectrice, représente une lutte universelle pour réconcilier l’amour inconditionnel avec la perte et le danger.
Après avoir conquis le public des Journées Cinématographiques de Carthage (JCC) où il était en compétition officielle, le film confirme le talent de Meryam Joobeur comme une voix incontournable du cinéma arabe et africain contemporain.
La Source est bien plus qu’un simple film : c’est une expérience immersive qui transporte le spectateur dans un monde où réalité et fiction se confondent. Avec son récit poignant et sa mise en scène virtuose, cette œuvre s’inscrit parmi les grands films de ce début d’année.
Pour tous les amateurs de cinéma exigeant, La Source est une invitation à explorer les mystères de l’âme humaine, portée par une réalisation qui transcende les frontières culturelles et narratives.
Photo de couverture : Crédit @ WIKIMEDIA