Le château de Versailles a acquis une rare tabatière en porcelaine tendre de Sèvres commandée par Madame Adélaïde en 1786. Grâce au soutien de la Société des Amis de Versailles, l’objet rejoint un ensemble patrimonial consacré aux filles de Louis XV et témoigne, par sa finesse, du raffinement de la cour au XVIIIᵉ siècle.
Pourquoi l’acquisition de la tabatière de Madame Adélaïde marque-t-elle un tournant pour Versailles ?
Le 2 décembre 2025, au terme d’une vente aux enchères organisée au Royaume-Uni, le château de Versailles a ajouté à ses collections une pièce d’une rare élégance : une tabatière en porcelaine tendre de Sèvres commandée par Madame Adélaïde, fille de Louis XV et tante de Louis XVI. Cette acquisition, rendue possible par le mécénat de la Société des Amis de Versailles, s’inscrit dans une politique patrimoniale qui vise à restituer, autant que possible, l’univers matériel des occupants historiques du château.

De forme ovale et habillée d’un fond « beau bleu », nuance emblématique définie en 1778, la tabatière se distingue par la qualité de ses miniatures. Sur le couvercle et le dessous sont figurés les chiens de la princesse, dont Vizir, son célèbre petit chien lion abricot. Ces portraits délicats, évoqués dans les mémoires de la comtesse de Boigne, sont attribués à Nicolas-Pierre Pithou le Jeune, l’un des peintres les plus talentueux de la manufacture de Sèvres. La monture en or, ciselée et gravée, a été réalisée par les orfèvres parisiens Charles Ouizille et Pierre-François Drais, fournisseurs reconnus de la Couronne.
Les archives de la manufacture permettent de retracer l’ensemble de la commande, depuis la conception jusqu’à la livraison en janvier 1786. Documentée avec précision, cette tabatière apparaît comme un témoin précieux de l’art de vivre des filles de Louis XV. Les objets personnels de ce type, souvent démantelés au fil du temps, sont aujourd’hui très recherchés et rarement identifiables dans leur intégrité. Son entrée dans les collections nationales constitue donc un événement majeur.
Grâce à cette acquisition, Versailles complète un ensemble déjà dense consacré à Madame Adélaïde et aux princesses. Plusieurs œuvres majeures y figurent déjà : la commode livrée par Jean-Henri Riesener en 1776 pour son cabinet intérieur, une paire de vases étrusques achetée en 1787, ou encore une garniture de vases à fond lapis-lazuli réalisée en 1781. Les appartements restaurés de Mesdames, ouverts depuis 2013, offrent un écrin cohérent à ces pièces, permettant au public d’appréhender de manière plus précise le goût et le quotidien des princesses.
Le rôle déterminant de la Société des Amis de Versailles
Fondée en 1907 et reconnue d’utilité publique depuis 1913, la Société des Amis de Versailles joue un rôle essentiel dans l’enrichissement et la restauration du domaine. Forte d’un large réseau de membres et de mécènes, elle soutient depuis plus d’un siècle les acquisitions d’œuvres liées à l’histoire du château, qu’il s’agisse de mobilier, d’objets d’art ou de pièces issues des grandes manufactures royales.

© Château de Versailles, Dist. RMN © Gérard Blot
Parmi les nombreuses œuvres qu’elle a permis de faire entrer dans les collections figurent la commode de Madame Adélaïde, revenue à Versailles en 2018, la garniture de vases de Madame Victoire ou encore la paire de vases étrusques acquise en 2000. Son action contribue directement à la reconstitution des décors historiques des appartements, aujourd’hui parmi les espaces les plus richement remeublés du château. Son engagement se poursuit également à travers des campagnes de restauration, dont celle de la Tour de Marlborough actuellement en cours.
L’acquisition de la tabatière de Madame Adélaïde s’inscrit donc dans cette dynamique continue de sauvegarde et de transmission. Elle illustre l’importance du mécénat pour préserver les œuvres qui témoignent de l’histoire intime de la cour et de l’excellence des arts décoratifs français au XVIIIᵉ siècle.



