Le musicien franco-suisse Nicolas Fraissinet dévoile une version piano-voix de La corrida de Francis Cabrel. Une relecture intime, à la fois hommage et prolongement de son engagement pour la cause animale.
Nicolas Fraissinet redonne souffle à « La corrida » de Cabrel : un cri doux pour le vivant
En reprenant La corrida, l’un des titres les plus emblématiques de Francis Cabrel, Nicolas Fraissinet ne cherche ni à moderniser ni à surjouer l’émotion. Il revient à l’essentiel : un piano, une voix, et un texte qui résonne toujours avec autant de force. Cette version épurée, enregistrée chez Chandelle Productions et disponible sur les plateformes digitales, s’inscrit dans la continuité de son album Joie Sauvage, projet à la fois musical et poétique dédié au règne animal et à la résilience du vivant.
Le geste de Fraissinet est simple mais profond. Là où Cabrel, en 1994, dénonçait la cruauté de la corrida à travers le regard de l’animal, Fraissinet reprend ce cri avec la douceur du dépouillement. Son interprétation en piano-voix met à nu le texte, comme pour mieux entendre la douleur et la dignité qu’il contient. L’arrangement, volontairement minimaliste, ne cherche pas à séduire : il invite à l’écoute, au silence, à la réflexion.
« La corrida est pour moi l’un des plus grands chefs-d’œuvre de la chanson française », confie l’artiste. « Elle lie engagement et poésie avec une force sensible qui touche droit au cœur. » Ce respect pour le texte se ressent à chaque note. Loin de la démonstration, Fraissinet prête sa voix à ceux « qui ne l’ont pas », selon ses mots — les animaux, mais aussi peut-être tout ce qui, en nous, reste sans voix face à la violence du monde.
Avec La corrida, il ne signe pas une reprise au sens strict, mais un prolongement naturel de son œuvre. Joie Sauvage, son précédent album, mêlait déjà chansons, livre et spectacle autour d’un même fil conducteur : la nature, la condition animale et la place de l’homme au sein du vivant. Ce projet total, où la musique se fait récit et le récit performance, témoigne d’une démarche rare dans la chanson contemporaine — celle de tisser du sens plutôt que d’accumuler des formes.
Sur scène, Fraissinet alterne énergie et retenue, mêlant acoustique et textures électroniques, mais toujours avec le piano comme point d’ancrage. Cet instrument, au centre de sa démarche, devient ici l’unique partenaire de la voix, créant un espace d’écoute presque fragile. Ce choix du dépouillement fait écho à son engagement : revenir à la source, redonner une place à ce qui vit et respire.
Trente ans après sa création, La corrida de Francis Cabrel n’a rien perdu de sa portée. Elle reste l’une des rares chansons françaises à avoir su unir engagement et beauté poétique sans emphase. En la reprenant aujourd’hui, Nicolas Fraissinet ne cherche pas à la réinventer, mais à la réentendre. Il en offre une lecture sensible, à la fois personnelle et universelle, où la compassion devient une forme d’art.
Son interprétation rappelle que l’émotion n’a pas besoin de grandiloquence. En posant « quelques notes sur ces mots », comme il le dit lui-même, Fraissinet fait de cette reprise un acte de continuité : celle d’une musique qui écoute le monde avant de le chanter.




