L’ours et l’oursin, Fables d’Olivier Dessibourg
L’ours et l’oursin, Fables d’Olivier Dessibourg
Par Claude Luezior
La couverture de Debuhme, auteur de bandes dessinées, est délicieusement festive. Joyeuse et colorée, à l’instar des textes, elle annonce un festival de situations burlesques. Mais bien davantage…
Certes, il est assez intéressant de se souvenir que beaucoup d’entre-nous ont appris par cœur une fable de Jean de La Fontaine durant son enfance. Pourtant, l’illustre auteur ne déclinait-il ses vers principalement devant de nobles adultes de la Cour du Roi ? Comme si la mise en scène d’animaux était une critique plus ou moins cachée de nos propres travers, forces parfois, us et coutumes sociales, traits ô combien animaliers mais enfouis dans nos personnalités. Les fables, genre littéraire en principe codifié mais finalement peu usité, s’adresse-t-il peut-être, de manière intemporelle et universelle à l’enfant qui est en nous ?
Une deuxième ambivalence de ce recueil réside dans le vocabulaire de l’auteur : riche, voire parfois châtié mais résolument contemporain, cassant des codes, ouvrant grand ses alexandrins à une surprenante modernité.
L’humour y est omniprésent, avec des situations cocasses, dans la rencontre improbable d’animaux (l’ours et l’oursin, alors que l’on s’attendait à l’ours et l’ourson). Parfois, l’auteur sort de cette dualité et nous surprend dans une confrontation entre la souris et le scientifique, entre l’abeille et la pensée…Appétence pour les jeux de mots ou des expressions qu’il invente et triture avec délices et satiété, des situations apparemment improvisées (l’auteur est adepte du théâtre d’improvisation) mais en réalité très travaillées.
Par exemple, ces lignes extraites de L’orang-outan et le pouvoir :
Mirant en son miroir ses bajoues se bomber,
Les effets du pouvoir l’ayant désinhibé
Dans la félicité, comme s’il le méritait,
De ses facilités, il se félicitait.
En quelques vers, le poète bâtit une situation, nous entraîne dans un monde chaque fois différent, nous amuse, nous incite au rêve, nous fait prendre parti, tel dans des olympiades, pour l’un ou l’autre des protagonistes. Surtout, il nous surprend et nous fait sourire par la justesse ou la malice de la chute…
Une fable n’est donc pas seulement une historiette pour enfants mais un prétexte sur le chemin d’une morale, comme on le disait autrefois. Pourtant, ce recueil n’a pas de visée moralisante, théologique ou hautement philosophique. Il se veut léger, acidulé, sculpté et poncé dans la finesse et l’élégance, faisant écho à nos propres faiblesses, mais avant tout plein de bienveillance.
L’ours et l’oursin, Fables d’Olivier Dessibourg,
75 pages, 2024, Éd. L’Harmattan, Paris,
ISBN : 978-2-336-45093-3
Olivier Dessibourg
Olivier Dessibourg : titulaire d’un master en enseignement spécialisé, il exerce en Suisse sa profession depuis 13 ans. Grand amateur d’histoire, de philosophie et de théâtre d’improvisation, il s’est lancé il y a deux ans dans l’écriture de fables. L’ours et l’oursin est paru en 2024.
Souffle inédit
Magazine d’art et de culture
Une invitation à vivre l’art