Petite mise en lumière – Daniel Guénette
Par Christophe Condello
On met les points sur les i.
On se crie des mots à tue-tête.
On en a trop vu, trop entendu.
Ça ne peut plus durer.
Trop c’est trop.
On ne s’étonne plus de rien.
On n’a encore rien vu. Attendez !
Le pire est à venir.
On se couche le soir
Sans espoir du lendemain.
*
J’avais mal au ventre au cœur
Aux pieds de la douleur dans les bras,
L’envie de vomir.
Je traînais comme disent les poètes
Mon atonie buvant tous mes chagrins.
Une fée n’est pas venue
Consolatrice des veufs.
De sa croix un sauveur
N’est pas descendu.
Je n’attends plus rien.
*
Sombre, tu vois tomber un à un
Les nuages les pétales les masques.
C’est de légèreté que le ciel assombri
Se dégage.
C’est de l’air alourdi que la fleur
Se souvient.
C’est d’avoir combien de fois menti
Qu’un menteur se repend.
*
Rien n’a été comme si de rien n’était.
Il y a eu quelque chose de plus que le vent.
Tout n’aura pas été balayé.
Non une pyramide. Non une cathédrale.
Ni davantage un château de cartes.
Devant l’urne, un sourire se souvient.
*
Amis. Disséminés.
Autant dire: absence: poussière.
Dans l’œil, un grain. Souvenir affleure.
Prononce une seule parole capable
D’enfermer en cette urne un peu de sens.
Une larme plus clairement l’exprime.
*
L’aube frappe à la fenêtre.
Au réveil. Ouvrir. Enfin! L’air frais.
Combien de saisons demeurent?
La crue si claire des eaux printanières
Au soleil d’avril charrie quelque fétu.
Seul est ici l’inquiet. Tout fatras déposé.
Tous les poèmes sont extraits du recueil La fatigue de la haine, 2025, éditions de la Grenouillère.
Daniel Guénette habite Montréal. Professeur de littérature à la retraite, il a signé des recueils de poésie chez Triptyque, dont Empiècements (1985), Adieu (1996) et Traité de l’Incertain (2013), ainsi que trois romans, J. Desrapes (1988), L’écharpe d’Iris (1991) et Jean de la Lune (1994). L’école des chiens, toujours chez Triptyque, un livre-confidence, a suscité l’admiration des critiques. Soulignons La part de l’ode au Noroît. Aux Éditions de la Grenouillère, il a publié romans et poésies dont Miron, Breton et le mythomane ainsi que Vierge folle. Il signe des recensions dans la revue Possibles. Il publie également des critiques inspirées sur son blogue.
