À 82 ans, Salvatore Adamo fait paraître aujourd’hui « Des nèfles et des groseilles », un album de 25 titres né de la convalescence, de la peur de perdre sa voix, et d’un désir intact de chanter. Retour sur un long chemin, de la Sicile à la Belgique, des mines du Hainaut aux scènes du monde, d’une enfance modeste à la consécration internationale.
Salvatore Adamo, « Des nèfles et des groseilles » : un nouvel album entre souvenirs et résilience
Par la rédaction
Dans le salon feutré de son pied-à-terre parisien, Salvatore Adamo reçoit avec la discrétion qu’on lui connaît. La lumière y tombe doucement sur ses guitares, compagnons fidèles d’un parcours long de plus d’un demi-siècle. Le nouvel album « Des nèfles et des groseilles », publié ce 14 novembre 2025, s’inscrit à la fois comme un retour et un aboutissement.
Une enfance entre Sicile et charbonnel
Salvatore Adamo naît le 1er novembre 1943 à Comiso, en Sicile. Quelques années plus tard, son père émigre vers la Belgique pour travailler dans les mines, installant la famille à Jemappes, dans le Hainaut. Une longue hospitalisation pour méningite freine ses apprentissages mais aiguise son rapport à la voix et à la fragilité.
Il commence alors à chanter dans la chorale de l’église, apprend la guitare sans se faire trop prier, et se voit très tôt attiré par l’écriture de chansons.

L’escalade d’un « gentil jardinier » de la chanson
L’anecdote retient que son père, lassé de voir le disque « Sans toi, ma mie » stagner, organise une campagne juke-box dans les cafés belges — le tournant qui lance Adamo vers le succès. En 1963, arrive « Tombe la neige », qui impose son nom. Le jeune chanteur gravite vite parmi les premières scènes françaises : en 1965, il débute à l’Olympia de Paris à 22 ans, devant un public exigeant qui l’accueille chaleureusement.
Sur le plan international, il chante en plusieurs langues — italien, espagnol, japonais — et conquiert des marchés aussi divers que le Japon ou le Chili, cultivant un charme discret, fait de mélodie, de lyrisme accessible et de vraie honnêteté.
Une voix menacée, un album libéré
L’album « Des nèfles et des groseilles » ne sort pas par hasard. Lors d’un entretien, Adamo évoque deux passages à vide : un concert au Chili où il perd sa voix pendant six mois, puis un œdème pulmonaire qui l’a forcé à ralentir. De cette double menace est né un mot d’ordre : « Tant que ma voix est là, j’en profiterai ».
Le disque réunit 25 chansons — un nombre inhabituellement élevé — car l’artiste estime qu’il n’a « plus le temps de toutes les chanter ». Les thèmes ? L’enfance (vol de fruits chez les voisins, première amoureuse), la mémoire, bien sûr l’amour («ce sont celles que je préfère écrire»), mais aussi le regard posé sur le temps qui passe.
Le geste artistique d’une vie
À travers ses 80 millions de disques vendus, ses 50 ans de carrière et ses hommages — noblesse belge, décorations françaises et italiennes — Adamo incarne une certaine idée de la chanson : tendre, sensible, jamais spectaculaire, mais persistante.
Ce qui marque dans ce nouvel opus, c’est son absence de posture grandiloquente. Il ne se présente pas comme un monument mais comme un homme qui reste debout, parce qu’il fait ce qu’il aime. Le titre de l’album, « Des nèfles et des groseilles », emprunte à l’oralité rurale et à la mémoire simple — comme pour dire : « Je viens de là ».
Dix dates qui ont façonné la trajectoire de Salvatore Adamo
1943 – Naissance à Comiso, en Sicile.
1947 – Installation de la famille en Belgique, à Jemappes, où son père travaille dans les mines.
1963 – Succès international de Tombe la neige, qui lance définitivement sa carrière.
1964 – Sortie de Vous permettez, Monsieur ?, l’un de ses plus grands classiques.
1965 – Premiers pas à l’Olympia de Paris à seulement 22 ans.
1971 – Tournées internationales au Japon, en Amérique latine et au Moyen-Orient : Adamo devient un artiste mondial.
1984 – Premières difficultés vocales ; une période qui changera durablement son rapport au chant.
2001 – Adamo est élevé au grade de Chevalier dans l’Ordre de la Légion d’honneur.
2014 – Retour remarqué avec l’album Adamo chante Bécaud, salué pour sa sensibilité et la précision de ses interprétations.
2025 – À 82 ans, il publie Des nèfles et des groseilles, un album de 25 titres écrit après la crainte de perdre définitivement sa voix.
Pourquoi cet album vaut l’attention
Pour l’auditeur fidèle comme pour le lecteur curieux, cet album est un témoin d’une vitalité qui refuse l’éteinte. Il nous rappelle qu’un artiste ne se « repose » pas tant qu’il a quelque chose à dire, et qu’à 82 ans, on peut encore surprendre, travailler, enregistrer, et aller sur scène — comme l’a fait Adamo au Chili juste avant la sortie de l’album.
C’est aussi une leçon de cohérence : malgré les modes, les ruptures technologiques, les langages changeants de la pop, Adamo reste fidèle à sa mélodie, à son verbe, à son esprit. Et par-dessus tout, à sa voix — cette voix qu’il redoutait presque de perdre, et qui le ramène aujourd’hui à l’essentiel.
Sources et références
Wikipédia Salvatore Adamo
« Salvatore Adamo : sur C à Vous, il avoue avoir « volé » une chanson entendue à Gare du Nord », Public, 13 novembre 2025
Photo de couverture @ Wikimédia



