Kandinsky : la musique des couleurs à la Philharmonie de Paris

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La Philharmonie de Paris consacre une exposition magistrale à Vassily Kandinsky intitulée « Kandinsky : la musique des couleurs » en collaboration avec le Centre Pompidou. Près de deux cents œuvres dialoguent avec partitions, disques, objets d’atelier et archives musicales pour dévoiler l’importance du son dans la naissance de l’abstraction. Un parcours immersif qui révèle un Kandinsky vibrant, profondément habité par l’écoute.

Quand la musique forge un regard moderne

À l’origine de la peinture abstraite, il y a parfois un choc. Pour Kandinsky, ce fut Wagner.
En 1896, alors qu’il assiste à une représentation à Moscou, l’artiste éprouve une résonance intérieure qui ne le quittera plus. La musique devient alors un moteur, un révélateur. Elle l’aide à s’arracher à l’imitation du réel pour imaginer une peinture libérée, construite comme une partition.

L’exposition « Kandinsky. La musique des couleurs » replace ce moment fondateur au centre de son œuvre. Des paysages russes aux grandes Compositions, on perçoit une même recherche : atteindre une forme pure, autonome, qui se déploie comme une mélodie visuelle.

L’horizon sonore d’une époque en mouvement

L’un des atouts majeurs de l’exposition tient dans la manière dont elle contextualise Kandinsky dans l’effervescence musicale du début du XXᵉ siècle. Rien n’est figé : tout dialogue, tout s’entrechoque.
Scriabine, Schönberg, Stravinsky, von Hartmann… leurs œuvres composent l’arrière-plan vivant d’une période où chaque discipline cherche son propre langage.

Grâce à un parcours auditif au casque, la Philharmonie crée un espace de correspondances où les couleurs, les formes et les sons se répondent naturellement. L’abstraction ne s’y révèle plus comme une rupture, mais comme une continuité — un glissement progressif de la musique vers la peinture.

Kandinsky : la musique des couleurs

Le cabinet d’un mélomane : objets d’écoute et outils d’atelier

Dans une salle pensée comme un cabinet intime, le visiteur découvre ce que la vie matérielle de Kandinsky dit de son rapport au son : partitions chinées, disques soigneusement conservés, photographies d’amis musiciens, prospectus de concerts, livres théoriques.

Ces traces révèlent un homme qui écoute autant qu’il peint.
Et au centre de ce cabinet, les outils de son atelier rappellent combien la musicalité gouvernait son geste : travail sur la “sonorité” des couleurs, essais visuels inspirés de la 5ᵉ symphonie de Beethoven, recherches sur les rapports entre lignes et intensité.

La synthèse des arts comme horizon

L’exposition rappelle aussi l’ambition profondément interdisciplinaire de Kandinsky.
Toute sa vie, il explore l’unité des arts : projets scéniques, textes poétiques, œuvres théâtrales, écrits théoriques du Blaue Reiter. Après 1922, au Bauhaus, il poursuit ces expérimentations en dialogue constant avec danseurs, chorégraphes et compositeurs.

La Philharmonie recrée plusieurs de ses projets synesthétiques, dont la mise en scène des Tableaux d’une exposition (1928) et le Salon de musique présenté à Berlin en 1931.
Ces reconstitutions restituent un Kandinsky visionnaire, pour qui la peinture n’était qu’une partie d’un ensemble plus vaste : un art total.

Un parcours sensible, entre écoute et regard

Avec cette exposition, la Philharmonie de Paris propose un regard renouvelé sur l’artiste.
Loin d’une rétrospective classique, le parcours met en lumière la relation intime entre écoute et vision, entre sensation musicale et geste pictural.
Il révèle un Kandinsky profondément moderne, attentif au monde sonore qui l’entoure, et convaincu que l’art est une vibration partagée.

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Souffle inédit est inscrit à la Bibliothèque nationale de France sous le numéro ISSN 2739-879X.
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