Du 5 au 13 novembre 2025, le Théâtre du Châtelet rend hommage à l’une des figures fondatrices de la danse moderne : Martha Graham. Avec Graham 100 – Programme A, la Martha Graham Dance Company célèbre le centenaire de sa création. Quatre œuvres, quatre manières de faire dialoguer le passé et le présent, de redonner souffle à un héritage qui n’a jamais cessé d’inspirer le corps et la scène.
Martha Graham, cent ans de souffle et de corps au Théâtre du Châtelet
Fondée en 1926, la compagnie Martha Graham est aujourd’hui la plus ancienne des États-Unis encore en activité. Sa fondatrice, pionnière d’un langage corporel affranchi du ballet classique, a profondément transformé la perception du corps dansant. Chez Graham, le mouvement naît du centre, du souffle, de la contraction et du relâchement. Le corps devient espace de tension, lieu du drame et de la révélation.
Son œuvre, traversée par les mythes, les passions et la mémoire, a donné à la danse un vocabulaire émotionnel inédit. Au Théâtre du Châtelet, ce centenaire rappelle combien la modernité selon Graham ne fut pas une rupture, mais un ancrage : une manière d’habiter le monde avec le corps.
Quatre œuvres pour cent ans d’histoire
Le programme réunit deux pièces historiques de Graham, une création mondiale et une œuvre contemporaine.
Errand into the Maze (1947) revisite le mythe du labyrinthe. Inspirée de la légende de Thésée et du Minotaure, la pièce met en scène une femme affrontant ses peurs. La scénographie d’Isamu Noguchi, faite d’arcs et de cordes, crée un espace de lutte intérieure. Sur la musique de Gian Carlo Menotti, la danse se fait affrontement et délivrance.
Cave of the Heart (1946) plonge dans la figure de Médée. Ici, la passion dévorante devient matière chorégraphique : chaque geste brûle, se replie, se consume. Les lignes du décor, toujours signées Noguchi, prolongent cette violence contenue. Graham y explore la face sombre du désir – celle qui détruit autant qu’elle révèle.
À ces deux monuments du répertoire s’ajoute Désir, création mondiale confiée à Virginie Mécène. Ancienne interprète et pédagogue de la compagnie, elle signe une pièce où la mémoire du mouvement dialogue avec la grâce contemporaine d’Aurélie Dupont. Sur la musique de Stahv Danker, la danse y retrouve une douceur intérieure, un feu qui ne se dit plus mais se devine.
Enfin, Cave (2022) du chorégraphe Hofesh Shechter apporte une lecture radicalement contemporaine. Entre pulsations électroniques et énergie tribale, Shechter interroge ce que la modernité de Graham signifie aujourd’hui. Les corps s’y agitent comme en rituel : dans le tumulte, la mémoire des gestes anciens refait surface.
Héritage et réinvention
Ce centenaire n’a rien d’un musée. La Martha Graham Dance Company s’affirme ici comme un corps vivant, qui perpétue une technique sans la figer. L’héritage se transmet dans le souffle, dans la manière de plier, de résister, de reprendre appui. La contraction chère à Graham devient une respiration collective : un vocabulaire encore lisible dans les chorégraphes d’aujourd’hui.
La présence d’Aurélie Dupont, ancienne étoile du Ballet de l’Opéra de Paris, souligne cette continuité : celle d’un dialogue entre les disciplines, entre la rigueur du ballet et la liberté du mouvement moderne.
Le regard du Théâtre du Châtelet
Accueillir Graham 100 au Châtelet, c’est replacer la danse moderne dans un lieu d’histoire et d’ouverture. La grande salle parisienne devient l’écrin d’une transmission : celle d’une esthétique née outre-Atlantique, mais dont les échos sont universels. Le théâtre accompagne la représentation d’échanges avec les artistes et de rencontres autour du répertoire, offrant au public une plongée sensible dans un siècle de création.
Une célébration du corps et du temps
Plus qu’un hommage, Graham 100 est un passage de témoin. Dans la tension du geste et la rigueur du mouvement, on perçoit la permanence d’une pensée : celle d’une femme qui voyait dans la danse non pas une démonstration, mais une nécessité. Martha Graham a fait du corps le lieu du drame et de la beauté, du silence et du cri. Un siècle plus tard, sa compagnie continue de le rappeler, avec la même intensité, la même foi dans le mouvement comme acte de vie.
Agenda
THÉÂTRE DU CHÂTELET, 75001
Du 5 au 13 novembre 2025
Du mercredi au samedi à 20h, dimanche à 15h
