L’Europe a froid encore – Eric Sivry
Mercredi en poésie avec Eric Sivry
« Il fait un froid de tombe sur l’Europe » Pablo Neruda, Le Chant général
Poème d’Eric Sivry
L’Europe a froid encore
L’Europe a froid encore,
elle grelotte…
Chétives la contrée qui borne
ses regards, et la Poésie même !
Bien trop faible la flamme
de la collusion,
del’ Humanisme.
Voyager sur l’aile des mondes,
préluder au Dialogue.
Ô dialogue, nous te disons Tout-Puissant !
Nous voulons nous arracher à la haine,
ne parlant que d’une bouche.
Faire tomber ces murs imbéciles que dressent des rois absurdes !
Ô espérance ! Nouveaux navires de port en port,
de cap en cap,
de minuit à midi !
N’enjambons-nous le silence
sous les pavois du jour ?
Plus légère m’est la résistance,
et le mélange des langues sur le vélin
de l’Abondance.
Plus haute la lumière pacifiée,
la verve des paroles qui s’élancent !
* * *
J’honorerai les songes, toute pensée pacificatrice, toute allégeance aux platoniques territoires de l’art et de la philosophie.
Que s’agite la foudre par l’ivresse, les grandes artères des joies célestes !
Que se déploie l’intelligence de l’oubli, de la justice, de l’insouciance !
Rien n’est plus beau qu’un peu de liberté, qu’une heure de fantaisie, que les métaphores du sensible !
Réponds aux tortures, à l’injustice, à la cruauté, impétueuse littérature, conscience des profondeurs !
Salue ces astronautes de pays ennemis qui se serraient la main dans des vaisseaux jumeaux ! La Russie, l’Amérique se fiançaient en un rêve de paix dans la nuit quiète et chaude.
Arrière ! Acrimonies, tyrannies et démences !
Homme, réveille-toi, il n’est plus temps de vivre l’exécrable, le tourment et l’offense.
Écoutons l’Homme, le poète, écoutons leur enfance : l’abjection et le mal dans leur chant se défont.
Et moi, qu’offrais-je d’autre qu’un peu de tempérance, qu’un peu de mansuétude parmi tant de forfaits ?
La Marche du Temps, (poèmes inédits)
Eric Sivry
Eric Sivry est né le 1er octobre 1959 à Paris. Poète et critique littéraire français. Il a écrit quinze recueils de poèmes, dont À Force de Jours (Schena, 2006) ; Instants de Voyages et autres heures inventées (L’Harmattan, 2010) ; Askémata, la durée et l’instant (edizioni universitarie romane, Rome, 2015) ; Vie d’Artemio Muerte (L’Harmattan, 2019) ; Pris en otage, (Unicité, 2021) ; Sans Moi (Jacques Flament, 2021) ; des récits, L’Ile perdue (Tensing, 2013) ; Une Sirène (Canada Mediterranee Centre, Toronto / D’Ici et D’Ailleurs) ; du théâtre, Faustine (Aga / L’Harmattan, 2018) ; des essais, Une autre conception de l’Autre (Aga / L’Harmattan, 2019). Il est en outre critique d’art, directeur de la collection d’art contemporain « Intuitions cosmopolites », L’Harmattan, auteur de Deux peintres de l’Intuition, Alain Béral et Jean-Claude Pommery (2020) ; Chrystelle Roger, du Vécu à l’Imaginaire (2021) ; Danielle le Bricquir, une mythologie personnelle (Unicité, 2021).
Privilégiant une réflexion sur l’expression de l’intuition en art, il est à l’origine du groupe intuitiste, de la revue « Intuitions », avec Sylvie Biriouk, avec qui il a animé pendant dix ans l’émission de radio « Le Pont des Arts », a écrit le manifeste Pour un art de l’intuition (Anagrammes, 2003 ; rééd. Hermann, 2016).
Son œuvre de critique littéraire s’intéresse plus particulièrement aux œuvres de Marcel Proust, Yves Bonnefoy, Paul Éluard / Man Ray, et Hédi Bouraoui.
Tableau de couverture : Claude Monet LA CHARRETTE