Mirela Leka Xhava est une poétesse franco-albanaise née à Elbasan, en Albanie. Diplômée en langue et littérature albanaise de l’Université Aleksandër Xhuvani, elle a longtemps travaillé comme bibliothécaire à la Bibliothèque Universitaire de sa ville natale.
Mirela Leka Xhava : Au-dessus du miroir brisé
Absurde
(Camusienne)
Au dessus du miroir brisé l’absurde erre
divisé en milliers de morceaux à la fois
Pour recréer des images de vous-même
À refaire en mille autres alternatives
Où chacun respire un peu
Au-delà de l’énigme de la vie, érigeons les pyramides de l’éternité
Au-delà des ténèbres vers la lumière dans la rencontre finale.
Au dessus du miroir brisé
L’ombre lumière de la bougie s’éteint
Avec des milliers d’autres…
Versets sur verre
Des rideaux de pluie tapotent doucement les fenêtres
Sur la vapeur tiède, je commence à écrire quelques vers
Étonnamment, ni pour la pluie, ni pour l’automne de la mélancolie
Mais pour la prière du soleil comme dans les rites païens.
Parfois la vapeur commence à sécher petit à petit
Les lettres disparaissent comme si elles n’avaient jamais été écrites
Je voulais juste que le soleil réchauffe ma journée
Les doigts laissent des traces du passé sur le verre.

Nuit étoilée
Les étoiles tomberont à nouveau ce minuit jusqu’à l’aube
Les larmes de Saint Laurent, avec les Perséides de poussière cosmique, gèleront du regard de Méduse
Ajoutant aux sculptures de l’univers.
Au-delà des nuages transperce la douleur, l’appel à l’humanité qui défiait même les rois et les dieux
Les vivants regardent les étoiles et prient pour eux-mêmes
Là-haut, très loin, là où les limites sont repoussées jusqu’au dernier souffle.
Nostalgie
J’emporte tout avec moi
En partant, la joie
En revenant, le désespoir.
Et il ne reste plus rien.
Tout s’écoule comme à travers un tamis percé
Les jours ne suffisent pas aux mots.
À l’aéroport, la valise prend le prochain vol
Je l’attends qu’elle revienne sans un mot, sans bruit
Blessée encore une fois par la séparation,
Inexistante ;
Comme moi…
C’était l’été, hier
(Un souffle de Baudelaire)
C’était l’été, hier — et déjà l’automne
Frôle le seuil de la saison nouvelle,
Au matin d’une nuit d’août pleine d’étoiles filantes.
Les oiseaux picorent les miettes d’un festin fini,
D’autres s’envolent, loin, avant que vienne l’hiver.
C’était l’été, hier, et ce soir tombe plus tôt.
Tandis que d’autres s’assiéront, pour rallumer les cierges de l’espérance.
Mirela Leka Xhava, Auteure franco-albanaise

Mirela Leka Xhava est une poétesse franco-albanaise née en 1966 à Elbasan, en Albanie. Diplômée en langue et littérature albanaise de l’Université Aleksandër Xhuvani, elle a longtemps travaillé comme bibliothécaire à la Bibliothèque Universitaire de sa ville natale, tout en collaborant avec des journaux littéraires tels que Shkumbini et Le mot libre. Membre de la Ligue des écrivains jusqu’à son émigration en France en 2002, elle poursuit depuis une œuvre poétique marquée par l’exil, l’absurde et la lumière intérieure.
Ses poèmes sont publiés dans de nombreuses revues et anthologies internationales, en France, en Albanie, au Kosovo, mais aussi en Belgique, Inde, Espagne, Canada, Tunisie, Roumanie, Italie ou encore aux États-Unis. Finaliste de plusieurs concours prestigieux (Printemps des Poètes de Sartrouville 2021, Festival de Poésie Méditerranéenne de Rome 2022, Mili-Duel 2024…), elle est également membre de la Société des Poètes Français.
Parmi ses œuvres figurent Je n’aime pas l’hiver à mes yeux (1999), Les fleurs de la rue Montesquieu (2022) et Le voyageur des vents du sud (2024). Elle vit aujourd’hui à Bordeaux, où elle continue de créer entre deux langues, entre deux rives.