Poème de Lorrie Jean-Louis
Mercredi en poésie avec Lorrie Jean-Louis
Poème de la poétesse québécoise Lorrie Jean-Louis
Écoulé toutes les couleurs
dans les sillons
qui fossiliseront
notre oubli
je crois que je n’aime plus le turquoise
retire-le
de nos sentiments
laisse-le ciel
*
Mon sexe est une blessure liquide
une armée de solitudes se dresse en moi
je suis d’albâtre et d’agave
des eaux charrient
des misères océanes
plus vieilles que moi
plus fortes que moi
des désordres désarmés
me guettent
aux rivages trop boueux
la vie me déshabille
nue de pierre
nue de vent
je n’ai que des peaux
viles
fidèles aux marées
une douleur imprenable
une forteresse de mendiants
ni femme
ni fête
des chevaliers aveugles
me cherchent et me noient
mon sexe
une blessure liquide
les terres asséchées
sous le soleil meurtri
insomniaque
la complainte de l’absence
un désir émaillé
une mer bègue
*
Qui es-tu ?
la fille du silence
la sœur du déni
que vois-tu ?
des chimères
qu’espères-tu ?
hier
*
Lorrie Jean-Louis
Née à Montréal de parents haïtiens, après un baccalauréat en Histoire, Culture et Société, Lorrie Jean-Louis réalise une maîtrise en littérature sur Le corps noir et l’intersubjectivité. Elle poursuit des études en bibliothéconomie par la suite. Elle cumule diverses expériences professionnelles en médiation interculturelle, enseignement, animation, lecture, édition. Elle publie en juin 2020 son premier recueil, La femme cent couleurs. Elle a récemment joint l’équipe de Communication Jeunesse et offre divers ateliers. Elle fait partie du comité éditorial de la revue Liberté et est présidente du conseil d’administration aux Éditions du remue-ménage. À présent, elle se consacre à l’écriture. Ses sujets préférés sont la justice sociale, la question raciale, une attention particulière à la lecture. Ses influences vont de Toni Morrison à Saramago en passant par Stefán Zweig.
Elle a remporté le Prix des libraires 2021, le Prix du CALQ – Œuvre de la relève à Montréal 2021, ainsi que le Prix de l’artiste émergent.e de Primary Colours/Couleurs primaires pour 2020.
Poésie