Poèmes de Rim Battal

Poésie
Lecture de 3 min

Mercredi en poésie avec Rim Battal

Faim

Des corps ont passé et ton poing
Nu de tout poids
S’obstine à croire à la pertinence
Du coup qui part seul
Comme seul argument

C’est la table qui le reçoit
Il n’y a pas mort d’homme

Quel dommage ! Nous aurions
Eu peut-être un nouveau jour
Férié pour servir au dehors
Une soupe à la rue pleine
De dents qui croient
À la morsure comme seul argument

 

Vernaculaire

Quatorze heures, Tzara
La nudité tranquille de son corps comme élément
de langage d’une certaine nécessité
écrire sa nudité le plus tard possible
son corps tranquille et nu sur les draps

Nous prenons le temps que nous n’avons pas
nous folâtrons sur le coton d’Égypte
légers et nus

Parler de sa nudité
de sa façon d’être nu
la façon qu’a son corps d’être nu
la tranquillité caniculaire de son corps nu
comme élément de langage
d’une nécessité certaine :
le fer est sans issue pour les étoiles

Son corps tranquillement nu
solide et sain métal de transition ; fer
malgré l’abandon malgré la forêt
emballage tranquille de la terrible marée qui afflue
vers ma main quand je le caresse

Ce n’est pas un cinq à sept : nous cueillons le temps
son corps nu, tranquille, nom vernaculaire du désastre

I

Qui du maître ou de l’esclave
vit plus longtemps
vit plus heureux
vit plus vaillant
l’esclave connaît mieux le repos
le soleil et le contentement
le maître
est un mystère

II

Le bronzage est-il beau parce qu’il
rappelle le travail dans le champ
le chant et le coude et le bois coupé
ou pour ce qu’il figure du repos sans fin
et de l’oisiveté du maître
ainsi qu’on l’imagine
[mon bronzage est ma levée de bouclier]

III

J’infuse dans l’eau
je bulle
mesure mon souffle
j’oublie
que pour quelques cocktails
j’accepte
un bracelet électronique
tout le séjour durant
là où mon pouls bat
le plus fort

Rim Battal

 

Rim Battal est une artiste, poétesse et journaliste marocaine francophone.
Elle commence à se consacrer à la photographie artistique et à l’écriture après des études de journalisme à l’Institut Supérieur de l’Information et de la Communication (ISIC) de Rabat.
Elle publie son premier recueil de poésie en 2015, aux éditions LansKine : « Vingt poèmes et des poussières ». Son deuxième recueil, « Latex » (2017) ainsi que « Transport commun » (2019) paraissent également aux éditions LansKine.

La poétesse
Lire aussi 
Partager cet article
Suivre :
Souffle inédit est inscrit à la Bibliothèque nationale de France sous le numéro ISSN 2739-879X.
Laisser un commentaire