Jeanne Dielman, 23 Quai du Commerce, 1080 Bruxelles

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Chantal Akerman - Photo : Mario De Munck / Wikimédia

Consacré par le magazine Sight and Sound comme le plus grand film de l’histoire du cinéma, Jeanne Dielman, 23 Quai du Commerce, 1080 Bruxelles consacre la cinéaste belge Chantal Akerman comme une figure majeure du septième art. Un chef-d’œuvre féministe et radical, redécouvert près de cinquante ans après sa sortie.

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« Jeanne Dielman, 23 Quai du Commerce, 1080 Bruxelles » : Chantal Akerman signe le plus grand film de tous les temps

Réalisé par Chantal Akermann 1975 ;  produit par Evelyne Paul et Corinne Jénart

En 2022, un tournant historique a marqué le monde du cinéma. Le célèbre sondage du magazine britannique Sight and Sound, organisé tous les dix ans depuis 1952, a élu Jeanne Dielman, 23 Quai du Commerce, 1080 Bruxelles de Chantal Akerman comme le plus grand film de tous les temps. Pour la première fois dans l’histoire de ce classement de référence, une femme réalisatrice occupe la première place.

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Ce film franco-belge, sorti en 1975, met en scène Delphine Seyrig dans le rôle de Jeanne, une veuve vivant avec son fils adolescent, dont la vie ordonnée bascule dans la monotonie, la solitude et la désillusion. En trois heures et vingt minutes, Akerman explore le quotidien d’une femme contrainte de se prostituer pour subvenir à ses besoins, révélant le vide existentiel d’une vie soumise aux automatismes domestiques.

Le film s’inscrit dans une démarche profondément féministe et expérimentale, à la croisée du cinéma narratif et de la performance. Par son rythme lent, ses plans fixes et son absence de spectaculaire, Akerman bouleverse les codes du cinéma traditionnel et impose une écriture cinématographique nouvelle, attentive aux gestes, au silence et à la répétition.

Depuis sa création en 1952, le classement Sight and Sound est une institution. En 1952, Le Voleur de bicyclette de Vittorio De Sica dominait le palmarès. De 1962 à 2012, Citizen Kane d’Orson Welles conserva son trône avant d’être détrôné par Sueurs froides (Vertigo) d’Alfred Hitchcock. En 2022, la victoire de ce film — qui occupait seulement la 35e place en 2012 — a bouleversé la hiérarchie du cinéma mondial, ouvrant la voie à une reconnaissance des voix féminines dans un domaine longtemps dominé par les hommes.

Chantal Akerman : une visionnaire du cinéma moderne

Chantal Akerman Jeanne Dielman, 23 Quai du Commerce, 1080 Bruxelles
Chantal Akerman – Photo : Mario De Munck / Wikimédia

Née en 1950 à Etterbeek, Chantal Akerman est une cinéaste franco-belge au parcours singulier. Elle tourne son premier court métrage à seulement 18 ans, avant de réaliser son premier long métrage à New York en 1972. C’est en 1975, avec ce film, qu’elle accède à la notoriété internationale.

Akerman est reconnue pour son approche audacieuse du cinéma : ses films interrogent le temps, l’espace et la féminité, et s’inscrivent dans une esthétique minimaliste influencée par le cinéma d’avant-garde. Son œuvre, à la fois intime et politique, a marqué plusieurs générations de cinéastes.

Profondément marquée par le décès de sa mère Natalia, Chantal Akerman met fin à ses jours en 2015 à Paris, à l’âge de 65 ans. Son œuvre, redécouverte et réévaluée depuis, continue d’inspirer artistes et chercheurs à travers le monde.

Pourquoi (re)découvrir ce film aujourd’hui ?

À une époque où la place des femmes réalisatrices est enfin reconnue, cette œuvre d’une modernité absolue interroge la condition féminine, la solitude, le silence et la répétition des gestes du quotidien.

Véritable manifeste artistique, le film de Chantal Akerman prouve que le cinéma peut être à la fois politique, poétique et radicalement libre.

Photo de couverture @ Wikimédia

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Souffle inédit est inscrit à la Bibliothèque nationale de France sous le numéro ISSN 2739-879X.
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