Paul – La résurrection de James Paul McCartney

Bande dessinée
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Avec Paul – La résurrection de James Paul McCartney (1969-1973), publié chez Casterman, Hervé Bourhis livre une bande dessinée aussi jubilatoire que précise

Paul McCartney après les Beatles : Une renaissance en BD signée Hervé Bourhis

Avec Paul – La résurrection de James Paul McCartney (1969-1973), publié chez Casterman, Hervé Bourhis livre une bande dessinée aussi jubilatoire que précise, consacrée à une période charnière dans la vie de l’ex-Beatle. En se concentrant sur les années qui suivent la séparation du mythique quatuor de Liverpool, l’auteur retrace les étapes d’une reconstruction artistique et personnelle, rarement mises en lumière avec autant d’humour, de sensibilité et de détails.

Paul - La résurrection de James Paul McCartney

Après avoir déjà exploré l’univers des Beatles dans Le Petit Livre Beatles (2010) et Retour à Liverpool (2021), Hervé Bourhis s’attarde ici sur une phase méconnue : celle où McCartney, fraîchement séparé des Fab Four, sombre dans la dépression avant de rebondir avec ténacité et inventivité. Cette BD revient ainsi sur une époque trouble pour le musicien, alors âgé de 27 ans, qui voit ses anciens camarades l’ignorer, les médias le dénigrer, et le public lui préférer l’image plus radicale de John Lennon.

Dans un récit mené à la première personne, où Linda McCartney intervient fréquemment, Bourhis dévoile un Paul à nu : perdu, alcoolisé, reclus dans sa ferme écossaise, mais soutenu sans relâche par son épouse. C’est elle qui l’aide à se reconnecter à l’essentiel – la famille, la nature, la musique – loin du tumulte londonien. À deux, ils improvisent un groupe, les Wings, et sillonnent l’Angleterre dans un bus à impériale, en famille, avec leur bébé Stella dormant dans un tiroir reconverti en berceau de fortune. Bourhis y montre McCartney tel un jeune débutant, acceptant de jouer dans des campus sans ingénieur du son, acceptant surtout de repartir de zéro.

Mais l’album Band on the Run, enregistré dans les conditions périlleuses de Lagos (Nigeria), symbolise le tournant. Malgré un braquage, des tensions internes, et les doutes du légendaire Fela Kuti sur les intentions du groupe, McCartney retrouve l’inspiration et signe là un de ses plus grands succès. La scène où il assiste au concert de Kuti dans son club The Shrine est l’un des sommets émotionnels de la bande dessinée.

Au-delà du récit, la BD séduit par sa forme éclatée et inventive. Bourhis joue avec les formats, éclate les cases, insère des doubles pages spectaculaires, et use d’une palette de couleurs néo-psychédéliques où dominent le rose fluo et le violet. L’ensemble respire la liberté narrative et graphique. Les portraits de McCartney, souvent caricaturaux, flirtent parfois avec l’icône pop, tandis que les apparitions de Lennon – façon druide barbu et sentencieux – apportent une note cocasse et décalée.

Mais Bourhis ne se contente pas de l’anecdote. Derrière l’humour et le style enlevé, il réhabilite un artiste souvent réduit à son image lisse. McCartney, dans ces pages, apparaît avant-gardiste, féministe, végétarien engagé, bricoleur de génie. Loin du cliché de la pop sucrée, Paul restitue un créateur en quête de sens, d’amour et de musique, dans une époque où il était plus facile de l’enterrer que de le suivre.

Ce roman graphique documenté et réjouissant s’ajoute brillamment à la constellation d’œuvres récentes consacrées aux Beatles – après Get Back de Peter Jackson ou les publications de Michka Assayas. Il confirme qu’on n’a jamais fini de raconter l’après-Beatles, surtout lorsqu’un auteur aussi passionné que Hervé Bourhis s’en empare avec autant de finesse.

Paul – La résurrection de James Paul McCartney (1969-1973)
Hervé Bourhis (scénario et dessin)
Éditions Casterman, 88 pages, 20 euros.

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Souffle inédit est inscrit à la Bibliothèque nationale de France sous le numéro ISSN 2739-879X.
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