Nicole Coppey « chantons, chantons ensemble, êtes-vous prêts ? »
Nicole Coppey, artiste pluridisciplinaire suisse et italienne, conjugue écriture, dessin, musique, danse et montage audiovisuel dans une vision novatrice de la poésie. Fondatrice en 1997 de l’école « Un, Deux, Trois, Musiques… » en Suisse, elle défend une pédagogie alliant âme, corps et cœur.
Honorée par la Société des Poètes Français du Prix Guillaume Apollinaire 2023 et par l’Académie Claudine de Tencin du Prix de la poésie audiovisuelle 2020 et du Prix international de Poésie 2024, elle inscrit son art de l’écriture dans une forme et une esthétique qui s’adressent à toutes les générations.
Les nouveaux contes de Noël de Nicole Coppey sont à lire, à voir, à entendre, à écouter et à chanter. À l’occasion de la parution de ses nouvelles œuvres, qui invitent petits et grands à célébrer Noël dans la joie et la beauté, Souffle inédit a eu le plaisir d’interviewer Nicole Coppey.
M.B : Qu’est-ce qui vous a inspirée à écrire ces Nouveaux contes de Noël ?
Nicole Coppey : Pour moi, également musicienne, relier le texte à la musique est prioritaire. Je souhaite vraiment de tout cœur que les chansons traditionnelles de Noël soient inscrites sous la forme d’un conte qui nous amène au chant. Dans ce sens, il y a trois ans, le texte de mon premier conte de Noël, « Le petit sapin » tournait de manière créative autour de la chanson « Il est né le Divin Enfant« . Ce chant évoque la Nativité du Christ. Son texte est apparu au début du XIXe siècle. C’est donc une belle et bonne chose que de traverser le temps et de faire perdurer ces mélodies. Cela permet aux Familles de les connaître, de les reconnaître et même de les chanter ensemble.
L’année dernière, j’ai poursuivi avec le conte « La lumière de Noël » et l’ai associé au merveilleux cantique « Dans une étable obscure« . Il s’agit là d’un magnifique chant traditionnel du XVIe siècle, qui amène beaucoup de douceur et de profondeur. Il est interprété à quatre voix. J’apprécie beaucoup que les quatre registres (soprano-alto-ténor et basse) soient perceptibles, non seulement au niveau du chant mais aussi de la fusion des registres, mettant donc en lumière les voix de femmes et d’hommes.
Cette année, avec « Marjolain et le Secret de Noël« , j’ai introduit le superbe hymne en latin « Adestes fideles » qui remonte du XVIIIe siècle. Je trouve beau de proposer aux générations de chanter en latin. Par ailleurs, les sonorités sont solennelles et cette plénitude appelle à venir adorer. C’est très profond et important de garder cette dimension, d’autant plus qu’aujourd’hui on entend de plus en plus souvent dire « j’aime-j’aime pas » ou « j’adore… ». Je voulais ramener l’adoration à une dimension supérieure.
Le conte « Sur la rivière dorée » nous conduit vers la mélodie « Douce nuit« , très connue dans le monde entier. En l’insérant dans le conte, elle prenait une forme poétique. J’apprécie d’y apporter ainsi du calme et de la paix céleste.
Pour le livre « L’écureuil des bois de Narguilla« , j’ai désiré intégrer le chant que les enfants et toutes les générations aiment, à savoir « Les Anges dans nos campagnes« . C’est un cantique dont la première publication date de 1842. Il est joyeux et correspond bien à nos vœux de « Joyeux Noël ! » ! Il était donc indispensable dans ma démarche.
Ce concept me parle vraiment et m’inspire. J’ai donc aspiré à en faire bénéficier les Familles, enfants, parents, grands-parents, etc., toutes générations confondues, avec un texte qui apporte des éléments hors du monde… bien que dans le monde. C’est aussi pour cela que je pense que ces contes peuvent être lus par toutes les générations et cela, c’est un point auquel je tiens beaucoup.
M.B : Vos contes abordent des thèmes universels comme la générosité, la quête spirituelle ou la transformation. Pourquoi pensez-vous qu’il est important de revisiter ces sujets aujourd’hui ?
Nicole Coppey : Il me semble bon d’avoir une belle ouverture de cœur et d’Âme. Aussi, je souhaiterais que mes contes aident à élever notre esprit pour aller toujours plus vers des notions suprêmes. Lorsque je débute « Marjolain et le Secret de Noël » par « Il avait une foi, un cœur d’or et un corps semi-athlétique ce petit bonhomme aux cheveux jaunes« , je pose de suite ma vision spirituelle et philosophique. J’y vais jusqu’à mettre la couleur « jaune » pour que cela nous amène à voir le soleil, et donc la lumière.
M.B : Vous associez dans vos contes texte, musique, illustrations et vidéos. Pourquoi ce choix pluridisciplinaire ? Et quel impact espérez-vous qu’il ait sur vos lecteurs ?
Nicole Coppey : Pour que la transmission puisse avoir réellement sa place, il faut penser aux autres, être à l’écoute, observer, etc… Je joue donc sur plusieurs registres, visuel, auditif, etc… Pour toucher l’Être humain dans sa globalité, il faut éveiller des perceptions supérieures et communiquer sous des angles complémentaires et différents. Et comme il s’agit de contes, il me semble tout à fait normal que je ra-conte mon histoire, comme je la ressens, avec sincérité et authenticité. C’est la raison pour laquelle chacun des livres invite le lecteur à entendre l’expression de l’auteure. Pour cela, il accède aux vidéos en ligne en scannant le code-QR qui figure en fin de chaque ouvrage. Le pianiste qui m’accompagne aime composer. Je le laisse donc totalement libre, afin qu’il puisse s’exprimer musicalement. Cette union spontanée permet ainsi de colorer le texte et de rester davantage dans la voie de la simplicité naturelle.
M.B : Pourriez-vous nous parler des collaborations avec vos illustrateurs et expliquer comment leurs œuvres enrichissent vos récits ?
Nicole Coppey : En collaborant avec des illustrateurs, je leur donne le relais pour faire vivre l’œuvre. Lorsque j’écris, je vois déjà les images mais j’accepte leurs visions sans donner la mienne et les laisse créer selon leurs inspirations. C’est un acte d’humilité que de laisser la voie totalement libre à cette expression. Cela m’interpelle de découvrir comment ils mettent en images la globalité de l’histoire car il faut bien avoir le sens du tout pour illustrer le texte. J’aime les suivre dans ce cheminement, toujours en les laissant s’exprimer comme ils le souhaitent.
M.B : Le chant traditionnel joue un rôle clé dans vos contes. Pensez-vous que la musique renforce le lien émotionnel entre les familles et l’esprit de Noël ?
Nicole Coppey : Absolument car l’effet de la musique est extrêmement important sur et pour l’Être humain. Les bons sons sont structurants et ouvrent la voie de l’écoute profonde. Ils développent ainsi l’audition intérieure, donc la vie spirituelle. Je tiens absolument à choisir un répertoire bénéfique pour l’oreille et collaborer ainsi au développement de la personne. La musique devrait apporter de la douceur, de la paix, de l’Amour. Chanter, c’est aussi une discipline globale. La chanson touche tout l’Être humain car elle comprend tous les éléments musicaux, (rythme, mélodie, harmonie…). Vous avez tout dans la chanson. C’est la raison pour laquelle, avec insistante, je répète « chantons, chantons ensemble, êtes-vous prêts ? » C’est harmonisant, et donc équilibrant. Un répertoire adapté à Noël permet ainsi d’être non seulement dans l’esprit de Noël mais aussi de développer la douceur, la tranquillité, la joie, le bonheur, la paix, l’état profond… mais le bon état profond…
M.B : Dans Marjolain et le Secret de Noël, Marjolain découvre la grandeur de son âme. Quel message souhaitez-vous transmettre aux jeunes lecteurs à travers cette histoire ?
Nicole Coppey : Marjolain aime à se retrouver dans sa chambre sur son livre de collection. Dans cet ouvrage particulier sont écrits quelques mots clés qui sont certainement des étincelles lumineuses dans une vie. Marjolain les prend comme ils viennent et s’envole ainsi plus haut que le monde. Pour des enfants, c’est fort d’avoir des messages donnant référence à un livre précieux ; c’est comme construire sur les épaules des précédents, en bâtissant sur des fondations solides. Cela permet d’accepter d’être guidés là où le souffle nous emporte, tout en gardant nos repères. Dans cet élan, on peut être dans l’univers en une confiance céleste. Certains lecteurs le percevront immédiatement puis d’autres…dans le temps… L’essentiel est d’avoir lancé la suggestion car dès qu’on ouvre la voie à l’esprit suprême, on ouvre la voie à la grandeur de l’Âme. Ici Marjolain se laisse guider avec simplicité et humilité. Sa confiance ne pourra que lui apporter l’émerveillement.
M.B : Sur la Rivière Dorée évoque un nouveau-né transporté par une rivière. Quelle est la symbolique derrière cette image ?
Nicole Coppey : Petite, j’ai toujours été attirée vers les images bibliques, tout comme les récits bibliques. J’ai retenu particulièrement l’histoire de la Mer Rouge qui s’ouvre pour laisser le passage aux Israélites fuyant l’armée égyptienne, et également l’histoire de Moïse qui avait été déposé dans un panier pour être sauvé lorsque le Pharaon voulait faire mourir tous les nouveau-nés hébreux masculins. Même sans volonté consciente, ces récits et images vivent en moi et certainement que l’inspiration que j’ai eue concernant ce panier a dû être en rapport à la confiance totale (telle la Maman de Moïse) en la vie qui suit son cours, sur un fil, en équilibre, comme l’eau qui s’écoule, en mouvement… Dans cette tranquillité et cette quiétude, on peut être amené vers l’éblouissement. Au cœur de ce conte, j’ai souhaité le silence total, estimant que c’est uniquement le silence qui enrichira l’Âme et la compréhension mutuelle. Par une métamorphose cosmique et une quiétude silencieuse que nul auparavant n’avait jamais ressentie, ce monde d’après rassemble tous les peuples d’Orient et d’Occident et met en scène la Nativité et l’Adoration des Mages. Les cœurs et les Âmes sont transformés lorsque reprend le travail quotidien.
M.B : Avec L’Écureuil des bois de Narguilla , vous semblez adresser un message particulier aux enfants. Quelle est l’importance de la joie et de l’émerveillement dans la vision que vous proposez de Noël ?
Nicole Coppey : À travers ce petit écureuil, la vie prend vie et énergie. Nous sommes menés à nouveau vers des dimensions supérieures. Je souhaitais par-dessus tout que l’histoire nous guide vers des vertus. Ici, l’écureuil est vertueux et sage car, malgré une voix enrouée, il poursuit son travail avec discipline, patience et persévérance. En allant toujours plus loin, il prend du courage, de la force. C’est ainsi certain qu’il va mener une dynamique joyeuse non seulement pour lui mais aussi pour les autres. Il nous emmène vers cette joie joyeuse et plus il y a d’énergie de la joie, plus il y a de volonté, de foi, d’espérance, de force et d’Amour. En soi, tout se démultiplie en fonction de l’énergie que l’on produit. Ainsi l’émerveillement et l’enchantement pourront surgir. Le petit écureuil est au cœur de la lumière de Noël.
M.B : En tant que poétesse, musicienne et pédagogue, comment vos différentes facettes artistiques influencent-elles l’écriture de vos contes ?
Nicole Coppey : Sans cesse je pense et repense que tout est « un », qu’il y a de tout dans tout et surtout, qu’on ne doit rien séparer. Tout se complète. En l’écrivant, je fais chanter le mot et le transmets de manière multi-dimensionnelle. Tout bouillonne en moi et je danse mon texte comme je pourrais le dessiner et le bruiter. Je fais en sorte de pouvoir toucher certains par le biais de la musique, d’autres par le texte, et d’autres encore par le mouvement vivant…. etc. J’essaie donc de travailler avec tous les moyens que l’Être humain a en lui. Chacun prendra là où il est interpellé.
M.B : Vous avez été honorée par de nombreux prix, dont le Prix Guillaume Apollinaire 2023. En quoi ces reconnaissances influencent-elles votre travail et vos projets futurs ?
Nicole Coppey : Je suis très touchée par tous ces prix et émue par le Prix Apollinaire attribué par la Société des Poètes Français car ma poésie, bien que complètement éclatée, a réussi à toucher des lecteurs et des auteurs très littéraires. C’est merveilleux d’avoir pu les émouvoir avec ce style poétique.
Quant à moi, je prends tout comme cela vient et poursuis avec confiance et respect, dans la lumière qui me guide jour à jour… là où elle veut m’amener. Et je persiste en me guidant aux sons des Anges, à la lumière des astres, dans le silence de l’Âme et du Cœur.
Entretien conduit par Monia Boulila