La blessure du cristal – Zayneb Laouedj
Mercredi en poésie avec Zayneb Laouedj
Poèmes choisis du nouveau recueil LA BLESSURE DU CRISTAL
Beyrouth
C’est la petite fille
Que j’ai vue,
Elle creusait ses mots amers
Et les premiers cris de l’enfance.
Est-ce Beyrouth que je vois
Ou l’abîme d’une histoire inassouvie?
Est-ce l’enfant que je touche
Ou les débris de mon corps inerte ?
C’est la petite fille
Que j’ai vue
Accrochée
À la lisière d’un temps
Sans temps
Entre les mots de Derwich
Et les nuances sacrées de Marcel
C’est la petite fille
Que j’ai vue,
Elle cherchait
Son papillon
Arc-en-ciel
Et ses rubans
Volés à la lumière
D’un soleil
Violé
À la levée d’un jour maudit
Entre les mains d’un monde injuste
C’est la petite fille
Que j’ai vue
De ses larmes
Elle façonnait l’image de sa poupée
Transformée en poudre
Sous les sabots de la mort
C’est la petite fille
Que j’ai vue
Dans le creux des mains
Elle serrait un rêve fragile
C’est la petite fille
Que j’ai vue
Elle fixait
Un monde
Qui regarde
Mais ne voit pas
Un monde qui entend
Mais qui n`écoute pas
C’est la petite fille
Que j’ai vue
Étreindre sa petite chaise d’osier
Sous la table où régnait la peur
C’est la petite fille
Que j’ai vue
Saisir la douleur
De ses petits objets
C’est la petite fille
Que j’ai vue
Gravir un temps
Sans temps
Feuilleter les jours
Feuilleter les nuits
Ouvrir un ciel
Sur les lumières cachées
Et la fragilité des coquelicots
C’est la petite fille
Que j’ai vue
Égrener les larmes sans goût
Les larmes sans couleurs
Les larmes amères
Les larmes sans lumières
C’est la petite fille
Que j’ai vue
Semer ses rêves
Prélude d’une vie cachée
C’est la petite fille
Que j’ai vue,
Elle creusait ses mots sans mots
Et les premiers cris de l’enfance.
Est-ce Beyrouth que je vois
Ou l’abîme d’une histoire inassouvie?
Est-ce l’enfant que je touche
Ou les débris de mon corps sans vie?
Ghazza
Que les cris
Entendent leurs cris
Que les cris
Écoutent leurs cris
Que les cris
Extraient les cris de leurs cris
Que les cris
Saisissent les silences de leurs cris
Que les cris
Bousculent leurs cris
Que les cris
Dérangent leurs cris
Coquelicots
Toi enfant
Fragile feuille vagabonde
Entre plis et replis
De nos rêves
De nos fantasmes
De nos égoïsmes
O enfant
Espoir de rêve
Espoir de vie
Et si tu façonnes
Le monde à ta manière
Tu nous engendres
Tu nous craies
Nous serons ta sève
Nous serons ton argile
Et ta poterie
O enfant
Et si tu t`enfonces
Au giron de Dieu
Pour lui souffler
Le chaud et le froid
Pour lui apprendre
Comment tresser
Les cheveux d`une étoile
Comment offrir
La lumière à une déesse
Et lui ôter le voile