Mercredi en Poésie avec Hager El HILA
Routes
Routes du sel,
Routes des esclaves,
Routes de l’or,
Routes défaites par le vent,
Routes des oiseaux du désert
Sur le sable planant,
Les ailes déployées
Ouvertes vers l’élan.
Routes du non-sens
De l’existence,
Routes du signe
Sans signifiant,
Les routes se perdent
Sous l’effet du vent.
Routes de la chanson divine,
Route de la transe des dunes,
Route de la musique bédouine
Qui cherche les traces
Sans traces
D’un passé émouvant.
Routes des caravanes
Des nomades ambulants,
Trimballant leurs rêves d’enfants
Au rythme des chamelles et des vents.
Routes de l’errance vers le néant
Vécue comme une jubilation de l’être
Comme un brouillage du paraître.
Routes éparses de la fugue
Menant vers le scintillement,
Routes d’un nouveau soleil
Qui lance sa magie aux vents
Routes de la nudité,
De la terre qui charme les errants
Par ses stries embrouillées,
Route de la nudité de la pensée,
Dans sa recherche de la pureté.
Routes de la vie,
Routes de l’amour,
Routes illimitées
C’est sur ces routes
Que nos chemins se sont croisés.
Le château de sable
Dans mon château de sable
Je t’invite, en ces temps rudes,
De guerres et de massacres.
Rien que le vent du sud
Et qu’une terre sans mémoire.
Je n’ai rien à t’offrir
Qu’un peu d’illusion
Et qu’un semblant d’espoir.
Dans mon château de sable
Que de rêves morts
Que de déceptions passées
Mais un fil d’extase
Et le mariage des mots
S’inscrit contre le risque de l’oubli.
Dans mon château de sable
Mes cheveux s’allument au soleil
Et mes mains se crispent
Au contact du gel nocturne.
Dans mon château de sable
Je partagerai avec toi le verre d’eau
Et chaque goutte sera un élixir de vie.
Dans mon château ensablé
Je te dirai l’amour
De ceux qui se sont ignorés
Et je te raconterai l’histoire
De cette femme qui t’a aimé.
Dans mon château de sable
Tu dénoueras tendrement mes mains
Pour les remplir de tous ces grains
Grains de vie et de volupté
Grains de rêve et de pensées.
Mon château se démolit
Tu n’as jamais existé.
Hager El Hila
Hager El Hila, poétesse tunisienne, est née au cœur de la Médina de Tunis. Ancienne élève du Lycée français de Tunis, elle a consacré une grande partie de sa vie à l’enseignement de la langue française. Après avoir soutenu une thèse de doctorat à la Faculté des Lettres de La Manouba, elle a rejoint le corps académique en tant qu’assistante, enseignant la littérature française.
Passionnée de littérature, de peinture et de cinéma, Hager El Hila explore ces univers avec une sensibilité unique qui imprègne ses écrits. Elle est l’auteur de deux recueils de poésie et de deux romans remarqués :
– Thusuros
– Testour ou l’âme andalouse
– Le Chant du sable
– Habiba, parfum de Halfaouine , récompensé par le Prix Zoubeida Bchir en 2020.
Son œuvre, riche et évocatrice, reflète un profond attachement à son patrimoine culturel tout en célébrant l’universalité des émotions humaines.