Poésie

Sur les traces de Lucie Delarue-Mardrus

Sur les traces de Lucie Delarue-Mardrus, la Princesse Amande

L’écrivaine et poète québécoise, Nora Atalla, sur les traces de son arrière-grand-tante, Lucie Delarue-Mardrus, la Princesse Amande

À la suite d’une invitation d’Isabelle Mountain, propriétaire du Pavillon de la Reine et de Jacqueline Duno, présidente de l’Association des amis de Lucie Delarue-Mardrus,  c’est en cet endroit mythique qu’a séjourné l’écrivaine et poète québécoise Nora Atalla et où ont eu lieu les 5 et 6 novembre 2022 diverses activités poétiques et musicales auxquelles elle a participé à la mémoire de son arrière-grand-tante par alliance, Lucie Delarue-Mardrus, poète, romancière, journaliste, historienne, sculptrice et dessinatrice française.

Le Pavillon de la Reine avait été acheté en 1907 par l’arrière-grand-oncle de Nora Atalla, le Dr Joseph-Charles Mardrus, traducteur des contes des Mille et une nuits, pour sa femme, Lucie Delarue-Mardrus. Ainsi, Nora Atalla s’est rendue à Équemauville, découvrant pour la première fois ce lieu qui fut la demeure de son ancêtre pendant 30 ans, endroit magique niché à flanc de coteau et surplombant Honfleur et l’estuaire de la Seine.

Au cours de ce week-end hommage, devant un public nombreux, Nora Atalla a donné une conférence sur son arrière-grand-tante et leur filiation familiale et littéraire ; elle a lu des extraits de poèmes de Lucie et des siens, en faisant le parallèle quant à leurs préoccupations communes, la souffrance et la mort. Elle a également présenté son propre parcours littéraire, sa démarche d’écriture et la poésie québécoise contemporaine, et a animé un atelier d’écriture de poésie. Pour elle, il s’agit d’un pèlerinage aux sources de cinq jours, sur les traces de son aïeule, à Équemauville et dans Honfleur, à la maison natale de Lucie, rue des Capucins, et au Cimetière Sainte-Catherine où sont enterrées ses cendres.

Native du Caire, d’origine gréco-libanaise et franco-géorgienne, Nora Atalla vit au Québec depuis l’enfance. Passionnée de voyages, elle a arpenté de nombreux pays cherchant à comprendre le monde et les êtres. S’inspirant de ses dépaysements, elle s’intéresse à la condition humaine ; c’est le cœur de son travail. Son souci du détail rappelle les peintres impressionnistes, avec des teintes en camaïeu et une tendance surréaliste. À travers une écriture exploratrice, toujours à la recherche du mot juste, elle décrit les drames humains, regard lucide et clinique posé sur l’humanité, la disséquant, tranchant dans le vif avec une précision presque chirurgicale.

Nora Atalla est l’auteure d’une douzaine d’ouvrages. Entre autres récompenses et nominations, elle a été lauréate en 2022 du Prix international de poésie Annette Mbaye d’Erneville du Festival international de littérature de Dakar pour son recueil La révolte des pierres. Ses textes ont été publiés dans près d’une cinquantaine d’anthologies et de revues littéraires au Québec et à l’étranger, et ont été traduits en plusieurs langues. Très engagée dans le milieu littéraire, elle a lancé en 2009 son projet « Les livres voyageurs », transportant par centaines partout où elle se rend les livres de poètes et d’écrivains québécois et canadiens francophones ; elle anime des ateliers auprès des jeunes et fait du mentorat auprès des écrivains en émergence.

D’autres conférenciers et artistes ont participé à cette commémoration, dont Amy Wells (maîtresse de conférences), Julie Gandrillon (chanteuse-interprète), Audrey Hiebel (cantatrice), Magali Nathalizio (pianiste), Hugues Morissen (architecte du patrimoine, histoire du Pavillon de la Reine, de Louis XVI à aujourd’hui).

L’écrivaine et poète québécoise, Nora Atalla, sur les traces de son arrière-grand-tante, Lucie Delarue-Mardrus, la Princesse Amande

LUCIE DELARUE-MARDRUS

Extrait des lectures les 5 et 6 novembre 2022 faites par son arrière-petite-nièce par alliance, Nora Atalla, poète et écrivaine

Tirés du livre de Robert Chouard, de l’Académie des Provinces française, février 1994 :

« LUCIE DELARUE-MARDRUS, DUCHESSE DE NORMANDIE »

« Puisqu’il faut mourir, ne devrions-nous pas logiquement, quand l’heure est venue, disparaître d’un seul coup dans l’invisible? » (Graines au vent)

 

JE SAIS

« Je sais que je suis un poète

Assez grand, ou qui le sera,

Le jour où le suprême drap

Sera replié sur ma tête …

 

LA MORT

Quand je serai morte, jamais

L’avril ne reviendra sur terre,

Ni cet automne délétère

Que passionnément j’aimais.

 

Car la terre et sa vaste fête

N’existent que pour qui sait voir.

Chaque fois que meurt un poète,

Tout s’en retourne au néant noir.

(Mort et Printemps)

 

Sur Honfleur que Lucie aimait tant…

 

UN CHANT DE RETOUR

Honfleur, ma ville de naissance

Que j’aime plus que de raison,

Je te reviens de l’horizon

Ayant mené loin mon enfance.

 

Je t’avais dans mon âme et ma chair,

Et si j’ai quitté ta jetée,

Ce n’est qu’à tout jamais hantée

Par ta grisaille sur la mer.

 

Ailleurs, il fait parfois bon vivre,

Mais toujours, ville des prés verts,

On est un peu ton marin ivre

Qui tangue à travers l’univers.

 

Qui sait quels calmes, quelles rages

On a vu loin de toi, Honfleur?

Quels continents couleur de fleur

Et qui sait même quels naufrages ?

 

Nul ne saura jamais jusqu’où

On a pu conduire sa barque.

Mais vois-tu quand on naît monarque,

Monarque on reste jusqu’au bout.

(La figure de proue)

 

Extrait tiré de son poignant recueil « À Maman ». Eugène Fasquelle Éditeur, 1920

 

La guerre, cette image effroyable, effacée

Pour un moment, s’est tue au fond de mon esprit.

Mais, à travers mon deuil, voici comme un grand cri

De soldatesque trépassée.

 

Tous les morts de la guerre, ô malheureux soldats!

Sous le ciel qui frémit, dans la terre qui’ bouge,

Vous voici donc couchés sans cortège et sans glas,

Frappés par la grande mort rouge!

 

La route s’ouvrait vaste où vous pouviez courir

Tout à coup vos vingt ans sont entrés dans l’histoire.

Mais la mort rouge est belle auprès de la mort noire.

Être tué n’est pas mourir.

 

Mourir, c’est endurer la peine forte et dure

Du mal qui suit son cours et révulse les yeux.

Mourir, c’est s’en aller parce que l’on est vieux,

C’est obéir à la nature.

 

Tous les morts de la guerre, immense tournoiement,

Jeunes spectres bleu-pâle, héroïque cohorte,

Vous qui vous débattiez en appelant « maman »!

Accueillez bien ma chère morte.

 

Pavillon de la Reine

L’association

Poésie

Lire aussi 

Souffle inédit

Magazine d'art et de culture. Une invitation à vivre l'art. Souffle inédit est inscrit à la Bibliothèque nationale de France sous le numéro ISSN 2739-879X.

2 thoughts on “Sur les traces de Lucie Delarue-Mardrus

  • Pour ta générosité et ta grandeur d’âme !

    Pour l’excellence de tes écrits, la vivacité que tu déploies au partage et à l’envol de tes mots au cœur d’une poésie d’intimité nous livrant ton humanisme et surtout ta passion altruiste des relations humaines, sincèrement bravo et félicitations!

    Amitié chère Nora! 🌷❤️🌷⭐️⭐️⭐️

    Répondre
    • Je vous remercie M. Boucher, vos mots me vont droit au cœur. Je suis habitée d’une passion, la poésie. Je suis honorée d’avoir dans ma famille des personnages qui laissé leur marque en littérature. J’aurais tant aimé connaître Lucie Delarue-Mardrus et Joseph-Charles Mardrus de leur vivant. Joseph-Charles était l’oncle de ma grand-mère, Eugénie Mardrus.

      Merci à Souffle inédit pour cet article!

      Répondre

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *