Nicole Randon, hôtesse des Lundis poétiques à la Société des Poètes Français, incarne une poésie et une calligraphie empreintes de douceur et d’élégance.
Nicole Randon, poète, artiste-calligraphe animatrice d’instants poétiques
A la Société des Poètes Français, association culturelle historique, 16 rue Monsieur-le-Prince, 75006 Paris.
Par Djalila Dechache
Présentation
À la faveur de la rencontre-hommage de l’auteur et philosophe Martial Sinda du 26 mai dernier, j’ai fait la connaissance de l’hôtesse de ce lieu magique. C’est avec brio, délicatesse et élégance qu’elle a mené cette présentation comme tous les lundis ; elle a laissé la part au dialogue qui s’est mis en place avec une salle pleine à craquer. Nicole Randon est une femme douce et affable, qualités qui se reflètent dans ses textes poétiques et ses calligraphies.
Elle assure également des performances avec des artistes d’horizons différents, anime des groupes d’écriture, d’abord comme professeure de lettres agrégée au Lycée Henri-IV à Paris puis dans son atelier LaPoésieMaMuse. Joli jeu de mots lorsque l’on sait que pour arriver à ce niveau d’amusement il a fallu des années de travail et de recherche.
La pratique de la calligraphie, découverte en Chine, la conduit à explorer la mise en espace de son écriture.
C’est que Nicole Randon est poète, artiste-calligraphe, plusieurs recueils poétiques édités dont ceux-ci en 2024 : L’écho des corps, Éditions du Cygne ; La mémoire du vent, Éditions des Poètes Français ; et un nouveau recueil qui vient de paraître chez Unicité : Paysages fragmentés. Tous les recueils sont illustrés par ses soins.
Dans son premier recueil cité, ce sont 37 textes avec leur saveur propre, leur univers aussi, même si l’on pressent les thèmes de prédilection de l’autrice-artiste. C’est une écriture elliptique qui jaillit, tel un pinceau qui se promène en menant la danse sur la page blanche.
Nicole Randon est une autrice qui aime la langue française et en joue ; elle aime aussi les haïkus, l’Asie, la nature, le temps, l’éphémère, la danse, la lumière… Ses textes sont de véritables instants de vie, de réflexions, d’images, de sensations ressenties, vécues, de réminiscences… Ils sont adressés peut-être à un lecteur ou une lectrice, à elle-même, à l’univers… Tous les titres sont des voyages, des transportements, des déplacements… Elle donne vie aux choses, aux objets, aux souvenirs, aux visions…
Ici
Le paysage se fait poème
Le lent pinceau
Promène
Sur les rives
Un rêve calligraphique
Étang
Lotus
Brumes
J’ai envie de souligner que l’écriture de Nicole Randon est une rêverie solitaire à la Jean-Jacques Rousseau, qui a besoin de cela pour laisser libre cours à son imagination, à son inspiration, à la musicalité des mots. Elle leur donne vie et les mots sont vivants, ils sont incarnés ici et se transforment en poèmes.
(extrait de Autre rive)
Faim si faim de mots
Je pétris les lettres
Qui s’allongent et se chevauchent
Dans ma tête, ma bouche et mes doigts
Alors rien ne mange l’affamée ?
Je ne fais que chercher
Dans le bol
Et j’avale
Les grains et les mots
Et aussi ce texte :
Éclairage blanc
Coquillage
Sur océan
Comme canoë sans attache
Hésitant entre deux places
Mon cœur chavire
Sur ma page
Entre exubérance et anxiété
Le deuxième recueil est aussi intense, pas moins de 25 textes le composent dont : Dans le vent de ma mémoire, et Cède…
Dans le vent de ma mémoire
Je navigue au hasard
En l’absence de tout signal
Je m’évade dans un étrange bal
Lors d’une belle nuit blanche
Je remets à flot
Mes plumes et mes pinceaux
Je dirige mon navire
Vers d’antiques souvenirs
Un tourbillon en flux continu
Multiplie mon énergie
Autour de la planète
Je croise des éclairs et des comètes
Des couleurs très rapides
Des jets de lumières qui palpitent
Et j’évite en riant
Les frêles épaves
Des tristesses échouées
Et aussi ce texte :
Cède…
Cède… Allège ton secret
Dis-moi, dis-moi
Tu retiens le mot de passe
Sobre éclosion
À la pointe piquante
Du menton
Douce énigme
Tendre esquisse
Regard lisse
Que lire dans ce sourire ?
Que cache ce regard ?
Cède… Libère ce secret
Léger comme ballon
Fragile comme bulle
Douce et pure évidence
Ferais-tu pénitence ?
Parleras-tu enfin
Ou faut-il protéger
En nos cœurs ce trésor
Si doux, dis-moi, si doux
De l’amour qui nous lie ?
À l’évidence ce sont des textes faits pour être lus à haute voix. J’ai fait l’exercice, les textes résonnent à merveille.
La présentation graphique a évidemment son importance, les espaces et les mots aussi. J’ai respecté autant que possible la présentation telle qu’elle est dans les recueils ainsi que la ponctuation. De plus, je précise que les illustrations de couverture sont de Nicole Randon.
Bien sûr, ce sont des extraits ; les deux ouvrages sont à lire, à goûter, à savourer, à boire et à sentir intégralement. La lecture laisse un doux sillage, parfois mélancolique, toujours élégant, ailé et lyrique.
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