Infini / José Muchnik
Infini
∞
Si poésie tend vers l’infini,
elle est Eclate les temps
Ouvre des instants en mille sens
effeuille l’éternité en un baiser
autopsie les mémoires de l’accent
Ravage les digues
Brise des syllabes encastrées
inaugure des langages foret
équarrisse des mots emballés
conquiert des espaces
Invente des galaxies sonores
décompose les forces de gravité
place en orbite des voix inconnues
Si poésie ne tend pas vers l’infini elle tend vers zéro
Ejacule mayonnaise
humilie le silence
Engraisse les rythmes saturant les hirondelles
Masturbe des miroirs pour conquérir la lumière
Le poète peut être supérieur à zéro
mais jamais tendre vers l’infini.
Il arrive parfois que poésie mette à l’épreuve le poète,
l’habille de vanité pour quelques sous,
le maquille avec des rimes vermeilles,
métaphores antirides,
accents siliconés,
lui croit qu’il existe,
accomplit des exploits,
déclame,
domestique des mâchoires,
montre son cul rouge tel un mandrill porte drapeau,
se pavoise en érection avec des sonnets en pointe,
décline son moi en tous les temps,
attends des échos d’un lac sans reflets.
Si vanité tend vers infini poète tend vers zéro.
Le dilemme toujours le même: la mort
Le dilemme toujours le même: la vie
Poésie, grappe de mort vive.
José MUCHNIK
Poète et anthropologue, né en Argentine dans une quincaillerie du quartier de Boedo de la ville du Buenos Aires, quartier où ses parents, immigrants russes dans ces terres, avaient jeté l’ancre. En 1976, suite à l’arrivée au pouvoir de la dictature militaire il s’exile en France, ou il réside toujours. Docteur de l’École des Hautes Études en Sciences Sociales de Paris, spécialisé dans l’étude des cultures alimentaires locales. Membre fondateur du groupe « Traversées Poétiques », correspondant des journaux « Generación Abierta » et « Desde Boedo » à Paris. Il a publié des nombreux ouvrages de poésie et romains, parmi eux : «Proposition poétique pour annuler la dette extérieure» (éd. bilingue espagnol-français); « 100 Ans de Liberté et Coca Cola », « Amazonie j’ai vu », (éd. bilingue espagnol-français); « Calendrier poétique 2000 », « Le Grain, le cœur et le mot » (Anthologie de poésie africaine sur les nourritures), « Chupadero » (en espagnol) ; « Traversées Poétiques, poètes argentins d’aujourd’hui » (compilation), « Critique poétique de la raison mathématique » (éd. bilingue espagnol-français); Sefikill : « Serial financial killers, palabras para el nuevo milenio », (en espagnol), « Geriatrikón » (en espagnol). Il a publié également des essais anthropologiques, réalisé des expositions de photographie … mais il préfère dire qu’il est « Josecito » de la quincaillerie, un poète du quartier de Boedo d’une ville appelée Buenos Aires … qui peut-être existe.
Tableau : La Vie et la Mort de Gustav Klimt